La rencontre, vendredi à Gammarth (banlieue nord de Tunis), sur les mécanismes permettant de relancer le tourisme tunisien, n’est pas allée au fond du problème…
Par Marouen El Mehdi
Il est vrai que la présence de Hammadi Jebali à ce workshop, sur «le flux touristique vers la destination Tunisie», était symbolique et que ses propos étaient rassurants, mais les intervenants n’ont pas touché aux véritables problèmes qui, depuis une année, nuisent au tourisme tunisien. On a discuté de la situation actuelle en long et en large, mais il a manqué une plus grande franchise.
Le désert, un immense réservoir non encore exploité
Promouvoir l’investissement touristique
Le chef du Gouvernement, qui parlait devant les représentants d’une centaine d’agences de voyages, des diplomates et des journalistes tunisiens et étrangers, a affirmé que «l’activité touristique est un facteur déterminant pour la stabilité des démocraties, et ce, eu égard à son étroite relation avec la garantie des libertés individuelles». «En dépit des difficultés rencontrées par le secteur, le gouvernement est optimiste quant à l’avenir du tourisme tunisien», a-t-il ajouté, relevant que le pays a déjà franchis un pas important sur la voie de la transition et que la nouvelle constitution «veillera à garantir les libertés individuelles, à renforcer les fondements de la citoyenneté et à instaurer une justice équitable et une presse libre».
Atelier de Tourisme Tunisien
Sur le plan économique, le gouvernement s’emploiera à impulser le secteur privé et à promouvoir l’investissement dans les différents secteurs, notamment touristique», a-t-il assuré. L’action sera concentrée, a-t-il encore dit, sur l’introduction de réformes dans le domaine touristique telles que l’augmentation du budget destiné au marketing et à la promotion de la destination Tunisie sur les marchés extérieurs.
La Tunisie est-elle encore une terre de sérénité ?
Tout en réitérant la détermination du gouvernement à relancer ce secteur vital, indiquant même que la future constitution prendra en compte tout ce qui touche au tourisme et à son développement (droits de l’Homme, libertés, indépendance de la magistrature, liberté de la presse, liberté de culte, droit au travail, encouragement des investissements et développement du tourisme…), M. Jebali a rappelé que l’Etat va être plus ferme pour imposer l’ordre et consolider la sécurité afin que le secteur retrouve, cette année, le rythme normal de son activité».
Les réformes déjà en place
Le discours était bon à entendre, mais la suite des travaux n’a pas été à la hauteur des attentes. Ilyes Fakhfakh, le ministre du Tourisme, a indiqué, de son côté, que la baisse de 44% du flux touristique en provenance de l’Europe en 2011 a influencé l’activité des compagnies aériennes et des agences de voyages travaillant sur le marché tunisien. Il a ajouté que le tourisme tunisien, malgré son potentiel humain, naturel et culturel, n’a pas tiré profit du progrès réalisé par le tourisme mondial (5% chaque année). Pour cela, le secteur a-t-il précisé a besoin de réformes structurelles, en particulier, en matière de formation, de marketing et de communication outre la diversification de l'offre touristique. «Nous allons œuvrer, à cette fin, pour tirer meilleur profit des expériences touristiques réussies et pour introduire les réformes structurelles nécessaires», a-t-il affirmé. Mais tout en rappelant que la relance préconisée résoudra les problèmes qui se posent actuellement, le ministre n’a pas parlé des mécanismes qui vont faciliter cette tâche, se limitant à dire que le potentiel du tourisme tunisien va bientôt s’améliorer et que les réformes sont déjà en place !
Dans toutes les interventions, on n’a pas entendu parler du problème de la sécurité, qui constitue encore une réelle menace ou qui est ainsi perçue par les touristes. Ces derniers, qui boudent la destination Tunisie, souhaitent voir le pays dans sa nouvelle copie, après la Révolution, mais la crainte d’un climat tendu et pas tout à fait sécurisé les fait encore hésiter. De même, on n’a pas entendu parler de la crise financière qui secoue l’Europe et qui a également contribué à la chute des entrées et des recettes du secteur, un peu partout dans le monde.
Sun, sea and sand, est-ce la seule offre de la destination Tunisie ?
Quelques signes rassurants
Frédéric Pierret, le directeur exécutif de l’Organisation mondiale du tourisme (Omt) s’est félicité des assurances faites par le Gouvernement, notamment à propos de la démocratie, de la modernité, de l’ouverture et de la tolérance, rappelant que la Turquie, à titre d’exemple, a vu son tourisme chuter de plus de 30% et que, grâce à une restructuration réfléchie, ce pays a retrouvé sa verve pour venir concurrencer les plus grands marchés du tourisme mondial. Il a rappelé le soutien total de son organisation à la Tunisie qu’il vient de visiter trois fois durant l’année 2011, annonçant la tenue d’un séminaire international sur le tourisme, et ce, les 16 et 17 avril 2012 à Djerba.
Les interventions des invités présents ont été assez superficielles. Quelques remarques et interrogations ont cependant attiré l’attention.
Va-t-on suspendre la commercialisation des boissons alcoolisées dans les hôtels ? Comment peut-on attirer plus de touristes ukrainiens (ils sont au nombre, annuellement, d’un million en Turquie et de 700.000 en Egypte contre… 20.000 en Tunisie) alors que la Tunisie ne dispose même pas d’une ambassade dans ce pays pour promouvoir le marché touristique tunisien !!! A propos de la consommation de l’alcool, le ministre a rappelé qu’il s’agit avant tout d’une liberté personnelle et qu’aucune mesure pareille ne va être prise.