Selon des confrères de Rabat, le ministre marocain de l’Industrie, du Commerce et des Nouvelles technologies, M. Ahmed Réda Chami, a pris contact avec son homologue tunisien, probablement M. Ridha Ben Mosbah, ministre du Commerce et de l’Artisanat, pour examiner les moyens à mettre en œuvre conjointement en réaction aux mesures protectionnistes que la France menace de prendre à l’égard des centres d’appel délocalisant au Maroc et en Tunisie.
Les centres d’appel au Maroc emploient 30.000 personnes qualifiées. La politique de l’off-shoring marocaine table sur la création de 70.000 emplois à l’horizon 2015. Autant dire que les mesures contraignantes que le secrétaire d’Etat français à l’Emploi, M. Laurent Wauquiez, a menacé de prendre contre la délocalisation des centres d’appels français à l’étranger va lourdement pénaliser le royaume chérifien.
La crédibilité de la France est en jeu
Rabat, qui ne compte pas se laisser faire, est en train de préparer son plaidoyer contre le protectionnisme français et compte profiter des prochaines assises des centres d’appels en France, prévues en septembre prochain, pour expliquer sa position et défendre les opérateurs français travaillant au Maroc. Pour cela Rabat a sollicité Tunis en vue de coordonner les efforts des deux pays, qui seront confrontés aux mêmes problèmes en cas de désengagement de centres d’appels français présents sur leur sol.
Les mesures protectionnistes que compte prendre le gouvernement français vont en effet se traduire par une perte de 30.000 emplois au Maroc et de 12.000 en Tunisie, estiment les experts. Les deux pays, qui se sont engagés dans des politiques de formation en langues et en nouvelles technologies pour répondre aux besoins spécifiques des donneurs d’ordres français, italiens, espagnols et autres, vont donc être doublement pénalisés.
La France qui, dans le cadre de ses relations bilatérales ou via l’Union européenne, ne cesse d’inciter les deux pays maghrébins à libéraliser leurs économies ne peut aujourd’hui rompre ses engagements vis-à-vis de ses deux partenaires sud-méditerranéens avec lesquels elle est liée par des accords commerciaux et de bon voisinage. La France perd également toute crédibilité aux yeux de ses partenaires lorsqu’elle appelle à la libre circulation des marchandises et met des obstacles à celle des investissements.
Black list dites-vous ?
Parmi les mesures visant à empêcher la délocalisation des centres d’appel, le gouvernement français parle de surtaxer les appels en provenance des centres d’appel implantés à l’étranger, de publier la liste de ces centres (une manière de les «dénoncer» ?) et d’assurer un soutien financier à ceux qui choisissant de rester (ou revenir) en France.
En réaction, les membres de la Chambre syndicale nationale des centres d’appel et de la relation client de Tunisie a publié un communiqué où elle déclare que «les mesures envisagées par le secrétaire d’État à l’Emploi français, en particulier celles relatives à la mise en place de taxation des appels ou la création d’une black liste de prestataires off-shore, nous paraissent totalement dépassées, inadaptées et sans lien avec les réalités économiques actuelles. D’ailleurs, elles ne recevraient sans doute pas l’aval de la Commission européenne, car elles sont ouvertement protectionnistes, discriminatoires vis-à-vis de la libre concurrence et contraires aux accords commerciaux internationaux.»
Malek Neili
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