La Mutuelle centrale des services agricoles traverse une mauvaise passe financière. Le ministre de l’Agriculture accuse la direction de corruption et recommande des licenciements massifs. La direction lui répond…

Par Marouen El Mehdi


Quel sort est réservé pour les mutuelles agricoles dans un pays en crise économique? Vont-elles pouvoir tenir le coup dans un paysage politique et social peu enclin à faire des sacrifices pour assainir un milieu qui a été ravagé par les opportunistes, proches de l’ex-pouvoir?

200 licenciements pour économiser 6 millions de dinars

La situation financière de la Société mutuelle centrale des services agricoles-Grandes cultures (Smcsagc) et ses répercussions négatives ont été au centre de la conférence de presse, tenue lundi par son conseil d’administration.

A l’origine de ce rendez-vous avec les médias, les vives critiques du ministre de l’Agriculture, Mohamed Ben Salem, qui accuse les hauts responsables de la Smcsagc de malversations et de mauvaise gestion qui ont précipité la crise financière qu’elle vit actuellement. Le ministre parle de la nécessité d’assainissement financier en évoquant des dépassements et une gestion inadaptée aux réelles ressources de la mutuelle. Dans une lettre adressée aux responsables de cette structure, il n’a pas hésité à exiger le licenciement d’environ 200 employés dont l’établissement n’a pas besoin et permettre, ainsi, de compresser la masse salariale qui devrait passer à 4 millions de dinars (MD) au lieu de 8 MD, actuellement. Il a également exigé de réduire l’enveloppe des diverses primes pour économiser 2 MD environ.

Hakim Slama

Des accusations sans fondements!

Ces recommandations émises par le ministre, suivies d’autres déclarations aux médias qui mettent en doute la compétence des responsables de la mutuelle et impliquent indirectement les premiers dirigeants, ont fini irriter ces derniers et les amener à mobiliser la presse et à jeter la lumière sur la situation de cette structure, présenter de manière différente les détails de la gestion financière et surtout appeler le ministre à cesser ce qu’ils appellent une campagne dirigée contre le conseil d’administration et des accusations infondées.

Le président de ce conseil, Hakim Slama, admet que des rentrées d’argent enregistrent parfois du retard ou même des baisses dues à diverses raisons, mais il a totalement nié de quelconques dépassements ou malversations. Il admet que la mutuelle souffre d’un déficit de l’ordre 200 MD, dont la moitié provient des frais et intérêts bancaires, mais il estime que la situation, malgré sa complexité, n’est pas irréversible et que le personnel, conscient de la nécessité d’adopter des mesures particulières d’austérité, est prêt à des sacrifices afin de préserver l’établissement et lui permettre de respirer.

D’après le président du conseil d’administration, il est encore temps d’intervenir et de remettre les pendules à l’heure, même graduellement, d’autant que tout le personnel en est à présent conscient.

Le bras-de-fer engagé entre le ministre et le conseil d’administration de cette mutuelle risque de connaître d’autres épisodes au moment où les responsables de la Smcsagc exigent du ministère de s’abstenir de parler de mauvaise gestion sans en fournir les preuves.

Il y a lieu de noter que les mutuelles agricoles et les coopératives centrales, toutes spécialités confondues, souffrent des mêmes maux, mais l’Etat a souvent fermé les yeux sur ces dépassements car ces structures évoluaient sous la tutelle de personnes influentes de l’entourage du président déchu qui en tiraient les plus grands profits. L’ardoise que trainent ces établissements auprès des banques et des fournisseurs provient en partie de ces trafics d’influence.

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