L’arrêt de l’émission satirique politique des guignols, sous la pression du gouvernement, pourrait être le prélude à une prise de contrôle par l’Etat de la chaîne Ettounissia TV et de la société Cactus Prod de Samy El Fehri.
Ettounsiya TV, créditée des meilleurs taux d’audiences au cours du dernier mois de ramadan, a cessé la diffusion, après des pressions du pouvoir, de son émission de satire politique Ellogik Essiyassi (Logique politique), qui se moquait plus particulièrement des dirigeants du pays et du parti islamiste Ennahdha, qui domine le gouvernement.
Coup dur pour la liberté d’expression
«J’ai appris auprès de sources au sein de la chaîne que la programmation des guignols a été arrêtée à la suite de pressions indirectes des autorités», a dit jeudi à l’Afp le secrétaire général du Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt), Mongi Khadraoui. «Les autorités n’ont pas apprécié la forme et le contenu du programme», a encore affirmé M. Khadraoui, estimant qu’il s'agissait d’un «coup dur pour la liberté d’expression».
Un journaliste de la chaîne, Sofiène Ben Farhat, interrogé également par l’Afp, a confirmé «l’arrêt soudain» de la diffusion la semaine dernière, moins d’un mois après le lancement des guignols, sans pouvoir en expliquer la cause.
Les accusations du Snjt coïncident avec des déclarations du ministre de la Santé, Abdelatif Mekki, qui estimait jeudi sur les ondes de la radio Shems FM que certaines émissions «dépassaient les bornes».
«Il faut respecter les symboles nationaux, le président de la république, le président du parlement, le chef du gouvernement (...); il faut que la critique soit dans le cadre du respect», a-t-il dit. «Certaines émissions ont dépassé les bornes du respect», a ajouté le ministre, issu d'Ennahdha.
Adnene Khedher dans les startings-blocs
Cactus production, le producteur de l’émission, est depuis la révolution de 2011 sous le contrôle de l’Etat, qui a repris les parts détenues par Belhassen Trabelsi, beau-frère de l’ex-président Ben Ali.
Ses studios, ainsi que ceux de la chaîne Ettounissia, fondée après la révolution et dirigée par l’animateur et réalisateur Samy El Fehri (ex-associé de Belhassen Trabelsi), pourraient être repris en main directement par un directeur général nommé par le gouvernement. On chuchote le nom de Adnene Khedher, ex-Pdg de l’Etablissement de la télévision nationale, proche du parti Ennahdha (au pouvoir) pour succéder à Samy Fehri.
I. B. (avec Afp)