L’organisation de défense de la liberté de la presse affirme qu’elle «suit avec une profonde préoccupation les derniers développements de la situation en Tunisie dans le domaine de la liberté d’expression et de presse.»
Article 19 relève, dans un communiqué, «des régressions au niveau des libertés acquises après la révolution, régressions liées aux positions adoptées par le gouvernement sur le processus de réforme du secteur de l’information et de la communication.»
Parmi ces positions, l’organisation cite le «refus d’appliquer les décrets-lois 115 et 116 adoptes par le parlement en novembre 2011», mais aussi les «dispositions de l’avant-projet du texte de la future constitution prévoyant la création d’une ‘‘instance indépendante de l’information’’ dont les membres seraient élus par l’Assemblée nationale constituante (Anc).» Article 19 estime qu’«une telle approche soulève de sérieux doutes quand à l’indépendance de l’instance de régulation.»
Autre position critiquée par l’organisation, le «projet de loi en cours de discussion au sein de l’Anc portant sur l’amendement du code pénal pour incriminer l’atteinte au sacré et qui constitue un grave danger pour la liberté d’expression.»
Article 19 relève d’autres indices, qui démontrent les difficultés auquel le processus de réforme démocratique en Tunisie est confronté.
Il y a d’abord, l’Instance nationale pour la réforme de l’information et de la communication (Inric) qui a décidé de mettre fin à ses activités, le 4 juillet 2012. «L’Inric a pris cette décision afin de protester contre l’indifférence du gouvernement face aux propositions de réforme contenues dans son rapport général publié le 30 avril 2012», notre Article 19.
L’organisation déplore également que la commission des experts relevant de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la révolution, la réforme politique et la transition démocratique (Hiror) ait pris la même décision, le 24 août 2012.
«Parallèlement, le gouvernement s’obstine à désigner les dirigeants des médias publics de manière unilatérale, en l’absence de concertation avec les professionnels du métier, de mécanismes transparents et de critères objectifs et équitables accordant la priorité au mérite et à la compétence», souligne l’organisation. Parmi ces nominations très discutables, l’organisation cite celles décidées de manière unilatérale, le 7 janvier 2012, des dirigeants à la tête de l’agence Tap, la Télévision Tunisienne et le Snipe, le 2 juillet 2012 des nouveaux directeurs à la tête des stations de radios publiques, le 17 août 2012 du nouveau Pdg de la Télévision nationale tunisienne, en la personne d’Imen Bahroun, ou encore, le 21 août de Lotfi Touati, un journaliste au parcours très controversé qui a commencé sa carrière professionnelle comme commissaire de police, comme directeur général de Dar Assabah, souligne Article 19.
«Le Président du Conseil d’administration de Dar Assabah, Mustapha Ben Letaief, et un autre membre du conseil, Fethi Sellaouti, ont présenté leur démission pour protester contre cette décision illégale et contraire aux principes de la bonne gouvernance», ajoute l’organisation. Qui «dénonce cette démarche du gouvernement tunisien, d’autant plus que les nouveaux responsables des médias ont commencé à interférer dans les affaires de la rédaction et à prendre des sanctions à l’encontre des journalistes. C’est le cas notamment des décisions injustes prises à l’encontre de Nadia Haddaoui et Najoua Zouheir (Radio Tunis chaine internationale), Bouthaina Gouiaâ (Radio Nationale) et Jameleddine Bourigua (Assabah)».
Tout en exprimant sa solidarité avec les journalistes tunisiens et «salue leur détermination à défendre la liberté d’expression et l’indépendance des médias et de leurs lignes éditoriales», Article 18 «appelle toutes les composantes de la société civile et de la société politique, y compris le président de la république, le président de l’Anc, le président du gouvernement et les dirigeants des partis de la troïka gouvernementale, à défendre l’indépendance et la liberté des médias et à impulser le processus de réforme du secteur de l’information et de la communication, sur la base des principes de la démocratie et conformément aux standards internationaux.»
Source: communiqué.