Le directeur général de Reporters sans Frontières (Rsf) Christophe Deloire a déclaré, jeudi à Tunis, que la situation de la presse en Tunisie «est très préoccupante et le pluralisme menacé».
«Ce qui a été gagné en Tunisie après le 14 Janvier en terme de liberté de presse ne doit pas être confisqué», a plaidé M. Deloire lors d’une conférence de presse en marge de sa visite à Tunis pour célébrer le premier anniversaire de l’ouverture d'un bureau de cette Ong à Tunis, le premier au Maghreb.
Trois journalistes sont agressés chaque semaine en Tunisie
Un deuxième bureau sera ouvert «incessamment» à Tripoli, a annoncé M. Deloire.
Le directeur général de Rsf a dressé un tableau plutôt mitigé de la situation de la presse en Tunisie et a constaté une tentative de placement sous contrôle politique du secteur de l’information, une détention capitalistique des médias, le retour de l’autocensure, l’absence de toute sanction suite aux violences physiques perpétrées contre des journalistes par la police et des groupuscules religieux.
Ces exactions «sont encouragées par des déclarations de responsables politiques ou ne sont pas découragées», a-t-il dénoncé.
En Tunisie, trois journalistes sont agressés chaque semaine, selon Rsf.
«Nous sommes déterminés à soutenir les journalistes tunisiens», a assuré M. Deloire affirmant que Rsf était prête à intervenir auprès des instances diplomatiques de certains pays proches de la Tunisie et de l’Union Européenne avec le risque de faire «mauvaise publicité» a averti le premier responsable de Rsf.
«Nous réclamons une déclaration de principe pour la défense de la liberté de presse en Tunisie», a clamé M. Deloire proposant aux autorités tunisiennes dix recommandations appelant notamment à la protection des journalistes, l’application des décrets-lois N°115 et 116, la répartition équitable de la publicité publique et l’interdiction de toute menace de privatisation de certains médias publics.
Evoquant «la liste noire» des journalistes corrompus sous l’ancien régime, M. Deloire a indiqué que Rsf œuvrera en vue d’aider à la mise en place «d’une commission indépendante qui ne soit pas sujette à des pressions politiques» pour réfléchir aux critères et à la démarche à suivre en vue de l’élaboration d’une telle liste.
Les déclarations de bonnes intentions sont insuffisantes
Au programme de la visite du directeur général de Rsf des rencontres avec la société civile, des responsables gouvernementaux et de l’Assemblée constituante.
M. Deloire précise avoir déjà rencontré le président du mouvement Ennahdha Rached Ghannouchi. Les propos ont été «courtois mais fermes», a-t-il dit, affirmant que Rsf ne juge pas «les déclarations de bonnes intentions» mais les actes. Rappelant que plusieurs journalistes appartenant au mouvement Ennahdha avaient été défendus par Rsf sous l’ancien régime dont le chef du gouvernement provisoire Hamadi Jebali et Abdallah Zouari.
Source : Tap.