Le show social ‘‘Andi Ma Nqollek’’ fait du chemin. Il draine des foules de plus en plus avides de téléréalité... Mais, dans une émission qui cherche à réconcilier les gens coûte-que-coûte, l’audimat ne devrait pas se mesurer à l’intensité de la douleur exhibée sur le plateau. Combien de réconciliés, l’ont fait pour sauver la face ? Par Jamel Heni.
Hormis quelques détails sans intérêt, quelques convenances locales, le concept du producteur hollandais Endemol est sauf. Pour ceux qui ne regardent pas la télé, il s’agit d’un salon d’aveux publics entre un hôte et son invité. Le truc est d’obtenir une réconciliation qui lèvera le rideau les séparant au propre et au figuré. Des tribulations conjugales à l’enfance abandonnée, tout y passe. Ou s’y casse. Quelques remarques cependant. Elles concernent le style d’animation.
A trop vouloir la réconciliation et la fameuse levée du rideau, notre ami Âla Chabbi, l’animateur de l’émission, donne l’impression de vouloir tourner son numéro à tout prix. Plus que légitime, c’est sa raison d’être diriez-vous ! Bien entendu. En effet. Mais une émission de cet acabit ne s’apprécie pas au nombre de rideaux tirés et retirés. Son prodige, le vrai, serait de reconstruire des liens flétris, défaits, brisés. Or un lien ne se rétablit pas en un quart d’heure. Entre deux pubs. Il se recoud dans la douleur et l’authenticité du deuil et du pardon. Parfois même dans la séparation. Oui. Lorsque les blessures sont profondes, massives et régulières, le retour à la «normale» est non seulement impossible mais carrément contre-indiqué. Une régression pathologique. Nous parlons sous le contrôle des thérapeutes. Tout n’est pas pardonnable et certains pardons sont malheureux, font souffrir, relèvent de la dépendance morbide...
Attention ! Nous sommes comme vous tous, pour le pardon, pour un monde merveilleux. Mais nous sommes tout aussi bien lucides sur la nature des hommes. Nous savons qu’ils pardonnent parce qu’ils se trompent et qu’ils se trompent parce qu’ils ne se portent pas que de bons sentiments...
Le succès de ‘‘Ândi Ma Nqollek’’ n’est pas forcément tributaire du rideau. Des réconciliations médiatiques. Le vrai succès, s’il en est, reviendrait à lever une à une les épines de la mésentente, aider à dissiper les malentendus, sans en ignorer l’existence, avancer vers un pardon sincère, heureux et constructeur. Un pardon qui ne s’explique pas uniquement pas la présence de la télé, la honte de décevoir des millions de spectateurs, ou les suppliques d’un animateur !
L’audimat ne mesure pas la douleur. Combien de réconciliés, l’ont fait pour sauver la face ? Il nous manque encore le «service après-vente» pour séparer les levées de rideaux durables des pardons audiovisuels !
Pardonnez-moi ce billet glissant sur le terrain savonneux de la téléréalité. Levons le rideau de fumée qui a soumis la douleur à l’animation...
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