Des documents tirés des archives de l’Atce se baladent en France où ils alimentent des articles de presse. Quand le gouvernement va-t-il nous dire ce qu’il compte faire de ces archives? Par Ridha Kéfi
‘‘Le Canard Enchaîné’’ publie mercredi une enquête sur les relations entre l'Agence tunisienne de communication extérieure (Atce) et la société de communication française Image 7 d’Anne Méaux.
Un «discret réseau d’influence» en de Ben Ali
L’agence publique tunisienne rémunérait la boîte de Com’ française plus de 200.000 euros (400.000 dinars) par an pour la mise en place et l’entretien d’un «discret réseau d’influence» en faveur de la dictature de Ben Ali, composé notamment de patrons de presse «tout acquis à sa cause».
Plus que les noms des journalistes français* qui étaient aux petits soins de Ben Ali et bénéficiaient de ses largesses, via l’Atce, ce qui a retenu notre attention dans cette enquête c’est qu’elle est basée sur des documents récupérés dans les archives de l’Atce. Ce qui pose un certains nombre de questions. Et d’abord celle-ci: où sont aujourd’hui ces archives? Ont-elles été sauvées de la destruction, sachant que le lendemain de la fuite de l’ex-président, des citoyens ont découvert par hasard de gros sacs poubelles remplis de documents détruits de l’agence? Pourrions-nous, nous autres journalistes tunisiens, les consulter, si elles existent, même sous certaines conditions? Nous pourrions ainsi aider à démonter le système mis en place par l’ex-conseiller politique de Ben Ali, Abdelwaheb Abdallah, et consolidé par l'ex-ministre de la Communication Oussama Romdhani, pour soudoyer les médias européens et arabes et faire la propagande du régime dictatorial déchu à l’extérieur.
Démasquer les profiteurs
Le gouvernement a peut-être d’autres urgences, mais il serait bien inspiré de dissiper les rumeurs concernant ces archives dont le dépouillement et l’analyse devraient aider à savoir dans quelles poches ont «échoué» les dizaines de milliards de dinars de dépenses de l’Atce depuis sa création au début des années 1990.
Le peuple tunisien a le droit de savoir qui a contribué, à l’intérieur et à l’extérieur, à faire durer le régime oppresseur de Ben Ali et combien d’argent du contribuable a été dilapidé dans les opérations de communication du régime.
* Quelques uns des confrères français qui ont goûté aux douceurs du «miracle tunisien»: Etienne Mougeotte (Le Figaro), Nicolas de Tavernost (M6), Dominique de Montvalon (Le Parisien) et Alain Weil, patron de Rmc-Bfm TV, Michel Schifres et Marie-Ange Horlaville (journaliste du Figaro spécialiste du luxe), Gérard Gachet (ancien de Valeurs actuelles), Françoise Laborde (France 2), Dominique de Montvalo, Jean-Claude Dassier (quand il était patron de Lci) et Christian de Villeneuve (qui dirigeait Paris Match et le Journal du Dimanche).