Alors que des mastodontes issus des monarchies pétrolières sont en train de «coloniser» – et c’est le cas de le dire – le paysage audio-visuel arabe, au Machreq comme au Maghreb, les chaînes maghrébines continuent de se la jouer local, au risque de perdre pied, à terme, sur leurs propres marchés. Dans cette débandade générale, seule Nessma TV essaie de développer un concept audiovisuel maghrébin. Sans beaucoup de succès jusque là…
Déjà présent dans le champ télévisuel, via Rotana, le Prince Alwaleed Bin Talel va y consolider sa présence, à travers son groupe Kingdom Holding Company (KHC), avec la création d’une nouvelle chaîne d’information générale. Pilotée par le journaliste saoudien Jamel Kashokhgi, la nouvelle station de TV se propose de refléter «le développement en Arabie Saoudite et dans le monde arabe dans les domaines politique, économique et social».
Alwaleed Bin Talel survole l'espace audio-visuel arabe
Un géant droit dans ses sabots
L’émergence d’un nouvel acteur dans l’espace télévisuel arabe va y attiser une concurrence déjà assez dure que s’y livrent les Al Jazeera, Al Arabia, etc., et, également, conforter la mainmise des pays arabes du Moyen-Orient et du Golfe.
Dans la perspective du lancement de cette nouvelle chaîne, le Prince Alwaleed Bin Talel a récemment renforcé son alliance avec le magnat australien des médias Rupert Murdoch. En effet, cet homme d’affaires vient céder 9,09% du capital de Rotana Television à News Corp, contrôlé par son partenaire australien, et dans laquelle il détient lui-même 7%.
Les pays de l’Union du Maghreb arabe (UMA) – et l’Egypte, malgré son poids politique et démographique – continuent, quant à eux, de briller par leur absence dans cette âpre bataille pour le contrôle de l’espace audiovisuel arabe. Seule Nessma TV, positionnée dès le début par ses promoteurs comme une chaîne véritablement maghrébine, en dépit de son enracinement tunisien, y porte les couleurs du Maghreb.
A l’Ouest du canal de Suez, rien de nouveau
Mais pour l’instant Nessma TV n’occupe cet espace – et ne le couvre – que très partiellement et imparfaitement, notamment parce qu’elle se cantonne principalement dans la variété et le sport, et de manière très inégale. Pour pouvoir prétendre jouer d’égal à égal avec les mastodontes venant des pays arabes situés à l’Est du Canal de Suez, et leur disputer la maîtrise de l’espace télévisuel arabe, la chaîne promue par les frères Nabil et Ghazi Karoui, le producteur Tarek Ben Ammar, patron de Quinta Production, et Silvio Berlusconi, Il Cavaliere soi-même, devra passer à la vitesse supérieure et mettre en œuvre des moyens – financiers et humains – autrement plus importants.
Et d’abord, Nessma TV doit s’atteler à accroître ses parts d’audience sur le marché maghrébin, sa principale cible commerciale. Ces parts demeurent encore relativement faibles, si l’on donne foi – et on n’a pas de raison de ne pas le faire – aux études d’audience diffusées régulièrement par les bureaux tunisiens Sigma Conseil et Mediascan.
Mohamed Laroussi