«Aucun n’a plus le droit ni de museler les médias ni d’empêcher les journalistes d’accomplir leur mission en toute liberté», ont lancé les journalistes, rassemblés lundi au siège de leur syndicat, à Tunis.

Par Zohra Abid


 

Suite aux violences infligées samedi par des agents de la police en civil à une dizaine de journalistes, lors de la couverture de la marche de protestation de l’Union générale tunisienne des travailleurs (Ugtt), le Syndicat national des journalistes tunisiens (Snjt) n’a pas tardé à réagir.

Médias et gouvernement : la mésentente

Deux petites heures après ces incidents, le Snjt a publié un communiqué condamnant les actes de violence avant de lancer un appel à un rassemblement massif, lundi 27 février à 10 heures à son siège à l’avenue des Etats Unis.

Le jour J, plusieurs journalistes ont répondu à l’appel. Plusieurs, certes, mais pas assez ! On s’attendait à une meilleure mobilisation. Interrogés à propos de leur absence, plusieurs journalistes ont déclaré ne pas avoir reçu le message du Snjt.

Avec l’accord des membres du bureau exécutif, Néjiba Hamrouni, présidente du Snjt, a décidé de médiatiser davantage l’évènement avant de prendre une décision. Selon nos sources, une assemblée extraordinaire aura lieu vendredi 2 mars, dont le lieu et l’heure seront annoncés incessamment. Car, il faut trouver l’espace adéquat pour rassembler les journalistes.


Néjiba Hamrouni s'adressant à ses collègues

L’essentiel pour ces dizaines de journalistes rassemblés dans les jardins de leur syndicat, c’est le moment où jamais pour s’unir... pour le meilleur et pour le pire. L’heure est grave et le gouvernement élu est en train d’adopter les mêmes pratiques que ses précédents, de Bourguiba et de Ben Ali, et d’afficher la même horreur d’une presse libre.

Menace d’une grève générale

Selon les membres du bureau exécutif du Snjt, personne n’aura dorénavant le droit de museler les médias. «Les journalistes vont continuer d’effectuer leur travail en toute liberté et ne céderont plus à aucune pression d’où qu’elle vienne. Nous avons été privés des décennies durant de l’exercice de notre profession, aujourd’hui, on leur dit non», a lancé à un parterre de journalistes Nejiba Hamrouni. «Si le gouvernement ne fait pas marche arrière, nous allons élever encore la voix», a-t-elle ajouté. Et d’agiter la menace d’une grève générale. Mais c’est là où le bât blesse. La grève sera-t-elle massivement suivie ? Il va falloir faire un meilleur travail de mobilisation.

Néjiba Hamrouni a notamment appelé ses collègues à prendre conscience de la gravité du moment. «Le secteur de l’information est vraiment menacé», a-t-elle martelé. Et de rappeler que la réforme du secteur doit passer par l'adoption des nouveaux textes de lois, notamment les décrets 115 et 116 publiés le 2 novembre dernier sur le Journal officiel de la république tunisienne (Jort), relatifs au nouveau Code de la presse et à création de la Haute autorité indépendante pour la communication audio-visuelle (Haica).


Une faible mobilisation

Aymen Rezgui, membre du Bureau exécutif du Snjt (il a été parmi les agressés du samedi dernier) a, de son côté, rappelé qu’agresser les journalistes est devenu l’objectif premier du gouvernement pour étouffer la vérité. «Nous ne nous contentons pas d’excuses du Syndicat des agents de sécurité qui ont promis l’ouverture d’une enquête», a-t-il lancé. Et d’appeler à l’union contre la nouvelle police politique. Ces éléments en civil, tenue de sport et casquette, qui se donnent l’alerte par oreillette avant d’agir pour tabasser ceux qui veulent les filmer en train d’agresser les manifestants.

Le secrétaire général Mongi Khadhraoui a appelé, quant à lui, à faire du journalisme, le vrai. «Et surtout ne pas induire l’opinion publique en erreur en masquant la vérité», a-t-il appelé. Et d’ajouter que les citoyens ont besoin qu’on parle de leurs préoccupations plus que de leur faire avaler n’importe quoi et surtout pas la langue de bois.