Les éditions Cérès viennent de publier un ouvrage intitulé ‘‘Vierges? La nouvelle sexualité des tunisiennes’’ de Nédra Ben Smaïl, psychanalyste exerçant à Tunis.
L’ouvrage, que l’auteur signera samedi à la librairie Mille Feuilles (99, av Habib Bourguiba 2078 Marsa Safsaf), lève certains tabous, anciens et nouveaux, liés à la sexualité féminine en Tunisie.
Ce texte est le premier volet d’un vaste projet mené par l’auteure pour repenser les usages et enjeux de la sexualité dans les cultures arabes et musulmanes et plus particulièrement dans la société tunisienne.
«Vraie ou fausse vierge?»
Son projet peut être considéré comme une troisième étape importante dans les recherches sur la question, un domaine inauguré dans les années 1970 par Abdelwahab Bouhdiba, dans une optique anthropologique en empathie avec les dogmes, reconsidéré par Frédéric Lagrange dans les années 2000 dans une vision culturaliste essentiellement homosociale. La rupture que se propose d’introduire Nédra Ben Smaïl porte sur une problématique autour de «désir féminin» et de ses implications psychiques et sociopolitiques.
«Vierge ou non vierge? Pure ou impure? Honorable ou déconsidérée? Telle a été la question que le mâle arabe n’a cessé de se poser face à la femme. Vraie ou fausse vierge? Saine et intacte ou ‘‘cassée’’ et réparée? Comment s’y repérer? Telle est devenue la question, posée sur le mode tragique, qui désormais hante l’homme et à travers lui l’ensemble de la société arabo-musulmane», lit-on dans le quatrième de couverture de l’ouvrage.
«La fréquence des relations sexuelles prénuptiales, le recours massif aux pratiques médicales de la re-virgination sont en passe de bouleverser les rapports entre l’homme et la femme. Ils viennent réinterroger de manière radicale les schémas préétablis du sexuel dans sa relation aux tabous, aux traditions et aux croyances», note encore l’auteure.
Nédra Ben Smaïl
Elle ajoute: «Sa mère, son père, ses frères, son futur époux, sa culture, sa religion, tout son corps social la veut vierge. La femme elle-même a intégré cette sommation mais a décidé d’y répondre autrement. Dorénavant, son corps de jouissance doit aussi avoir sa place. Elle sera “libre” d’aimer, de désirer et de jouir, même momentanément, mais non sans souffrance.
Une nouvelle ère du soupçon
«Qu’en est-il alors de l’issue? Sommes-nous au seuil d’une nouvelle ère du soupçon? Ou, au contraire, dans un cycle transitoire au terme duquel l’homme et la femme, ayant considéré l’impasse de la chose, cesseront de s’y référer? A quel prix ce tabou sera-t-il maintenu, réarticulé ou levé? Dans leur réponse, la société, l’islam et la médecine devront prendre acte de la posture et de la parole de la femme, tel un nouvel horizon.»
Nédra Ben Smaïl est psychanalyste exerçant à Tunis, présidente de l’Association de formation à la psychanalyse et d’échanges cliniques (Afpec) et membre de l’Association Espace Analytique (France).
I. B. (avec communiqué).