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Manu Dibango a pallié de la meilleure des manières à l'absence de Salif Keïta, qui devait animer la moitié de la soirée, et répondu à la terreur par un appel à la paix et à la solidarité.

Par Seif Eddine Yahia

L'ambiance était lourde lundi soir à Carthage. Le deuil national faisant suite au décès de Mohamed Brahmi à peine terminé, on apprenait que 8 de nos soldats avaient péri, lâchement assassinés, massacrés et dépouillés à Djebel Chaambi. Public et organisateurs, à l'image de l'ensemble du pays naviguaient dans un flou absolu après ce drame.

Salif Keita absent, Manu Dibango assure

Ayant appris la nouvelle deux heures à peine avant le début du spectacle, l'équipe organisatrice n'a pas voulu annuler le concert de Manu Dibango et de Salif Keita pour lequel public s'était déplacé.

Avant le spectacle, le célèbre saxophoniste Manu Dibango était bien présent dans l'enceinte du théâtre antique de Carthage contrairement à Salif Keita qui, pris de panique suite aux derniers évènements survenus dans le pays, a refusé de prendre l'avion afin d'honorer son contrat.

Une moitié du spectacle était donc tronquée, et Manu Dibango a dû réagir en conséquence en préparant dans l'urgence un concert adapté au désistement de Salif Keita mais aussi au drame survenu quelques heures plus tôt.

Après l'hymne national et un message des organisateurs appelant à résister contre toutes les formes de violence et de terreur, le spectacle a pu commencer dans une atmosphère pesante.

Six musiciens et deux choristes accompagnaient l'interprète du célèbre ''Soul Makossa'' pour ce concert. Après un discours appelant à la solidarité en ces temps troubles, le saxophoniste a commencé son concert par ''Douala Sérénade''.

Durant son concert, volontairement plus soft et jazzy qu'habituellement, Manu Dibango a souhaité faire voyager l'audience en traversant plusieurs styles musicaux. Le musicien camerounais et son orchestre sont par exemple passés des sonorités reggae aux percussions ivoiriennes dans le même morceau dans le morceau ''Full Up''. Le jazz aussi était à l'honneur puisque le musicien et son groupe ont interprété le célèbre ''Bolingo City'' avant d'enchainer avec de la rumba et le titre ''Jamais Kolonga'' du nom de celui qui, le premier, a annoncé l'indépendance du Congo-Kinshasa à la radio nationale.

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Hommage à Miriam Makeba et ''Soul Makossa''

Après avoir passé une partie du concert accompagné de son célèbre saxophone, Manu Dibango s'est installé devant les synthétiseurs afin de rendre hommage à la grande chanteuse Miriam Makeba disparue en 2008. Accompagné d'une de ses choristes, M. Dibango a repris le titre ''Malaïka'' (les anges) dans une version piano-voix proprement émouvante.

Après avoir laissé son duo de percussionnistes allier batterie et congas pour réchauffer l'ambiance, le musicien est revenu sur scène avec la totalité de son groupe afin d'interpréter le titre ''Mangabolo''.

En guise de bouquet final, le public de Carthage a eu droit à ''Soul Makossa'', le titre le plus connu de Manu Dibango, repris entre autres par Michael Jackson pour le titre ''I wanna be Starting Something'' dans son ''Thriller'' (qui reste à ce jour l'album le plus vendu de tous les temps.)

Comme l'a rappelé plusieurs fois M. Dibango après le concert, celui-ci s'est révélé être un des plus difficiles de sa carrière, en raison des évènements tragiques de Djebel Chaambi (mais aussi probablement à cause du désistement de dernière minute de Salif Keita). Rappelons que Manu Dibango a modifié son programme musical au dernier moment, en remplaçant certains des morceaux les plus festifs par des chansons plus en phase avec l'ambiance générale à Carthage.

Malgré la difficulté, le saxophoniste a répondu présent en offrant un concert digne placé sous les signes de la solidarité et du partage. A travers ce spectacle, Manu Dibango a rappelé, à ceux qui ne le savaient pas encore, qu'en plus d'être un des plus grands musiciens de notre continent, il était aussi un grand homme capable de distiller un message de paix et d'espoir même en ces temps troublés.