Deux jeunes Tunisiens de France, un artiste et un galeriste, ont réussi un véritable exploit : ériger le portrait géant de Farhat Hached, 60 ans après son assassinat par des extrémistes français, en plein coeur de Paris.
Par Moncef Bouchrara*
Imaginez la surprise que vous pouvez éprouver en circulant en voiture sur les boulevards extérieurs de Paris et tout d'un coup découvrir un immense portrait de Farhat Hached peint sur toute la hauteur d'un immeuble! C'est ce qui vient d'arriver et que vous pouvez voir sur les photos suivantes.
L'auteur de cet exploit est un artiste tunisien Da Bro, mais aussi et surtout un jeune galeriste Mehdi Ben Cheikh, qui en a permis l'existence. Ce jeune, dirige la galerie Itinérance, qui aura réussi en très peu d'années à lancer un certain nombre de jeunes artistes, et, qui a le vent en poupe à Paris, puisqu'il inaugure, ce 1er octobre, une opération exceptionnelle dans le 13e arrondissement : tout un immeuble promis à la destruction et qui a été confié à une centaine d'artistes du street art venus du monde entier. Tout cela avec l'appui bienveillant de la mairie de Paris.
Bravo donc pour la jeune génération des Tunisiens de l'émigration, dans ces moments où l'on a le droit de se désoler des spectacles affligeants que nous offrent les nouvelles élites à Tunis.
Pourquoi aura-t-il fallu que ce soit à Paris pour que cette jeune génération nous rappelle les fondamentaux de ce qui constitue le corps collectif tunisien?
Quelle belle signification et quelle revanche posthume pour cet homme abattu comme un malpropre, 60 ans plus tôt, un matin de décembre 1952 au bord de la route de Rades, par les services plus ou moins officieux, plus ou moins officiels, de la République Française?
«Ohibbek Ya Chaab!» (Je t'aime, ô peuple!), la célèbre phrase Farhat Hached raisonne au coeur de Paris.
Mais quelle belle guidance aussi que nous lègue aussi cet homme pour la République Tunisienne? Avec sa formule «Ohibbek Ya Chaab!» (Je t'aime, ô peuple!), Sidi Farhat Hached restera la boussole heureusement, pour tous ceux, Tunisiens ou pas, femmes et hommes, porteurs de la passion de l'égalité, qui observent ce véritable «bûcher des vanités» que nous offre la lecture des nouvelles de Tunis.
Le coeur de Tunis bat à Paris en ce moment et si vous avez le temps de faire un petit pèlerinage pour reprendre de l'espoir, allez avant la fin octobre vous recueillir devant cette oeuvre juste avant le quai d'Ivry (Place Mendes-France, dans le 13e arrondissement).
Quel symbole, mon cher et jeune Mehdi, tu as pu créer et quelles émotions tu es capable de susciter !
Mon salut, à la fin de ce mot, ira donc à tous les artistes tunisiens où qu'ils soient, à tous ces jeunes et moins jeunes, qui quand leur communauté s'enfonce dans les divisions et le désespoir trouvent les gestes justes et à hauteur de l'histoire qui les a pétris. Ce sont les poètes et les artistes qui créent le sens de ce que peut être une nation, après le courage des martyrs.
Vive les vraies élites tunisiennes de ce moment, donc, vive les artistes et honneur à eux!
* Ingénieur Conseil, consultant International, basé à Paris.