Dans son 1er long-métrage, Kaouther Ben Hania revient sur l'histoire du «Challat» (l'homme à la lame), qui avait alimenté les angoisses des Tunisois il y a une dizaine d'années.
Par Fawz Ben Ali
Qui n'a pas entendu parler du «Challat»? Le phénomène qui a pris une grande et mémorable ampleur durant l'été 2003.
Il s'agit d'un personnage qui a fait régner la terreur notamment parmi la gent féminine, car, il circulait sur une moto, une lame de rasoir à la main, d'un quartier à l'autre, et balafrait toute femme habillée «inconvenablement» à son goût et qui, par malchance, se trouvait à son chemin. Les histoires les plus folles ont alors circulé à son propos. Il est devenu une sorte de figure mystérieuse entourée d'un halo de fascination, de fantasme et de terreur.
Kaouther Ben Hania sur le tournage.
Le «Challat» des femmes a-t-il donc bel et bien existé ou n'était-ce qu'un mythe urbain voire une rumeur folle diffusée par quelque officine avec des desseins bien précis?
Telle est la question soulevée et l'enquête menée dans ''Le Challat de Tunis'', le nouveau film écrit et réalisé par la jeune et talentueuse Kaouther Ben Hania, produit par Cinétéléfilms & Sister Production et interprété par Jalel Dridi, Slim Bouchiba, Narimène Saïdène...
A l'occasion de sa sortie, un cycle de projections se tient depuis le 1er avril dans les salles de cinéma de la capitale : Le Rio à Tunis, CinéMadart à Carthage, Hambra Zéphyr à la Marsa et Amilcar à El-Menzah 5.
Un film plein d'humour, faisant éclater de rire le public à maintes reprises tout au long de sa projection, grâce entre autres à la spontanéité et à l'audace des propos des acteurs mais aussi des personnages réels qui sont venus apporter leurs témoignages.
D'où l'une des innovations de ce film, la réalisatrice ayant ingénieusement joint la réalité à la fiction. Pour pimenter davantage son documentaire, censé mener une enquête réelle, Kaouther Ben Hania a su, en effet, rajouter des scènes de fiction sans pour autant toucher à l'exactitude des faits relatés dans un style léger, et qui jette un regard sans complaisance sur une société tunisienne en pleine effervescence où le corps de la femme alimente les pires fantasmes.
Kaouther Ben hania et l'équipe du "Challat de Tunis" au Festival international du film de Dubaï, le 11 décembre 2013.
Prenant l'histoire du «Challat» comme point de départ, la réalisatrice a su traiter d'autres questions en rapport de près ou de loin avec cette affaire, notamment le regard de la société sur les femmes ou la violence menée à l’encontre de ces dernières.
Il faut souligner que la jeune cinéaste a su brillamment se distinguer lors de la 3e Rencontre des Réalisateurs Tunisiens par son court métrage ''Peau de Colle'', qui avait remporté le prix du meilleur court-métrage du Festival du Film Africain de Luxor, en Egypte.