Plusieurs ouvrages ont paru ces derniers mois consacrés à la révolution tunisienne : des essais, des romans et des livres témoignages… pour essayer de comprendre un moment fort de l’histoire humaine.
Dans ''La révolution tunisienne, Dix jours qui ébranlèrent le monde arabe'' (éd. Les Petits Matins, Paris), Olivier Piot, grand reporter ayant collaboré journaux ''Le Monde'', ''Le Monde diplomatique'' et magazines ''Géo'', ''Ulysse'' et ''National Geographic'', propose, dès le mois de mars, un livre puissamment ancré dans l’actualité, rédigé à chaud. Un récit captivant autant qu’un précieux témoignage historique.
C'est le récit au jour le jour de la révolution tunisienne, par le premier journaliste français présent sur place (pour ''Le Monde'' et ''Le Monde diplomatique''). Et une analyse des raisons de ce soulèvement ainsi que de ses effets dans l’ensemble du monde arabe. Le récit est rythmé par un reportage photo en noir et blanc .
Dès le 6 janvier, Olivier Piot est sur place. Il restera en Tunisie durant toute la durée des événements. Il promène le lecteur avec lui dans cette révolution en marche, au fil de ses discussions avec de nombreux témoins, de son émouvante rencontre avec la famille du jeune Bouazizi, des incroyables mouvements de rue, de ses démêlés avec des policiers qui cherchent en vain la carte mémoire de son appareil photo – dissimulée dans son col.
Au fil de ce reportage très vivant, nourri d’explications sur les ressorts de la révolte, apparaît une révolution avant tout populaire, née de la colère de marchands et de mineurs contraints à une précarité grandissante. Une colère qui, on le voit actuellement, ne cesse d’essaimer sous des formes différentes dans l’ensemble du monde arabe.
Deuxième ouvrage sur la révolution tunisienne est paru courant mars, ‘‘Vivre libre’’ (éd. L’Editeur, Paris). Dans ce texte court, la romancière française Claire Gallois revient sur le parcours de Mohamed Bouazizi, ce jeune tunisien de Sidi Bouzid à qui rien n’a été épargné et qui s’est immolé par le feu le 17 décembre 2010, déclenchant le soulèvement qui a balayé la dictature impitoyable et le système de népotisme et de corruption mis en place par Ben Ali.
Le parcours singulier d’un peuple digne
Dans ‘‘Printemps de Tunis, La Métamorphose de l’Histoire’’ (ed. Albin Michel, Paris, Cérès, Tunis), ouvrage paru également en mars, l’écrivain tunisien Abdelwahab Meddeb part à la rencontre, à Tunis et à Sidi Bouzid, des acteurs d’une révolution éclairée par des valeurs, à ses yeux, universelles, laïques et non-violentes. «C’est arrivé par surprise. Personne ne s’y attendait. Pourquoi d’un coup un peuple décide-t-il d’en finir avec l’oppression? Et avec la peur?», s’interroge l’auteur. Qui plonge dans la révolution et interroge certains de ses acteurs.
Le quatrième ouvrage consacré à la révolution tunisienne est sorti en avril, simultanément à Paris et Tunis, ‘‘Dégage’’, propose plus de 100 témoignages et plus de 500 photos sur la révolution tunisienne, recueillis par Viviane Bettaïeb, une orfèvre en la matière (Ed. du Layeur, Paris, Alif, Tunis).
Dans ‘‘Tunisie, une révolution arabe’’ (éd. Galaade, Paris), paru en avril dernier, Pierre Puchot, reporter Maghreb et Moyen-Orient à Mediapart, raconte, pour sa part, le parcours singulier d’un peuple digne, qui a chassé le dictateur et qui réclame justice, liberté et démocratie. C’est aussi une histoire d’engagement et d’insoumission, une invitation à bien lire la «page Ben Ali» pour mieux édifier ce que sera la Tunisie de demain.
La première révolution du XXIe siècle
Le psychanalyste franco-tunisien Fethi Benslama tente de comprendre, lui aussi, dans son ouvrage ‘‘Soudain la Révolution ! Géopsychanlayse d’un soulèvement ’’ (éd. Dénoël, Paris, Cérès, Tunis), publié en mai, les causes profondes à la fois politiques et psychologiques qui ont poussé un peuple, pourtant réputé modéré, à se soulever et renverser de façon si soudaine, l’un des régimes dictatoriaux les mieux établis de la planète, inventant, au passage, la première révolution du XXIe siècle. Quelles ont été les causes profondes de cette révolution, au-delà des explications socio-économiques, insuffisantes pour penser ce moment où des femmes et des hommes se sont levés ensemble pour s'émanciper?, se demande l’auteur.
Dans un autre ouvrage paru fin mai, ‘‘Maghreb les origines de la révolution démocratique’’ (éd. Hachette, Paris), l’historien français Pierre Vermerem revient sur l’impact réel de la révolution tunisienne sur le monde arabe et s’interroge notamment sur les chances réelles d’une transition démocratique dans la région.
Enfin, il convient de signaler la parution, le 6 juin prochain, de deux ouvrages de l’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun, inspirés par la révolution tunisienne. Le premier, ‘‘Par le Feu’’, met en scène l’immolation de Mohamed Bouazizi, le 17 décembre 2010, synonyme de point de départ du «printemps arabe».
Dans le second livre, ‘‘L’Etincelle’’, l’auteur marocain tente d’expliquer, quatre mois après, «ce qui se passe aujourd’hui dans le monde arabe», en se plaçant tour-à-tour dans la peau de Bouazizi, Ben Ali et Moubarak et en imaginant leur témoignage.
Imed Bahri