Le procureur de la république auprès du tribunal de première instance de Tunis a décidé aujourd’hui d’ouvrir une enquête judiciaire à l’encontre de la réalisatrice Nadia El Fani.
L’enquête concernera son film ‘‘Ni Allah ni maître’’ qui a suscité une polémique en Tunisie et une levée de bouclier dans les rangs des mouvements religieux. Elle fait suite à la plainte déposée par Me Monaem Turki, celui-là même qui fut à l’origine de la plainte portée contre l’Agence tunisienne d’internet (Ati) pour la fermeture des sites à caractère pornographique sur le web tunisien.
Le plaignant lit beaucoup les journaux
Dans une interview à la chaîne Hannibal TV, l’avocat avait affirmé sans craindre le ridicule qu’il n’avait pas vu le film en question, mais qu’il a pu constater, à travers les articles de presse (sic !), qu'il porte atteinte aux valeurs musulmanes et s’attaque à la religion musulmane. Me Monaem voudrait que la justice ordonne l’arrêt de la projection du film.
Contactée par Kapitalis, la réalisatrice, qui séjourne actuellement à l’étranger pour des soins de santé, a affirmé être au courant de la plainte mais pas encore informée de la décision du procureur de la république. «L’affaire ayant pris une portée politique, un comité d’avocats est en train de se constituer pour assurer ma défense», a-t-elle dit.
Les gens qui condamnent le film ne l’ont pas vu
Nadia El Fani s’est dit aussi indignée par la position du ministère de la culture qui s’est empressé, dans un communiqué rendu public vendredi, de préciser que le film ‘‘Ni Allah, ni maître’’ «n’a bénéficié d’aucune subvention financière ni avant, ni après la révolution tunisienne», démentant ainsi des informations, à ce propos, circulant dans les médias, et ne prenant même pas le soin de défendre la liberté d’expression artistique. C’est le moins que l’on aurait pu attendre d’un département en charge de la culture.
Sur le fond, Mme El Fani a précisé à Kapitalis: «Les gens qui condamnent mon film n’ont pas pris la peine de le voir. Ils le font par ouie dire. Qu’ils viennent le voir d’abord et nous le discuteront. A aucun moment je n’ai offensé l’islam ou les musulmans.»
Zohra Abid