Dans une interview au journal français ‘‘Le Télégramme’’, le poète tunisien résident en France revient sur les événements de ces derniers mois en Tunisie. Et exprime ses espoirs pour son pays.
Comment avez-vous vécu la «révolution de jasmin» ?
Je suis exilé en France depuis 1976 mais je n’ai pas attendu ces événements pour suivre ce qui se passe dans mon pays, résultat de plusieurs décennies de privation de vie politique, intellectuelle et médiatique. Cela a commencé bien avant Ben Ali. J’ai fait moi-même deux fois de la prison.
Plus que de révolution de jasmin, je parlerais de révolution de cactus car elle est partie des régions les plus pauvres qui n’ont pas profité du développement, ont subi corruption et foudres de l’injustice. Une réalité que le cinéma, la littérature ou le théâtre tunisiens ont dénoncée mais qui n’a pas été entendue en Europe.
Comment voyez-vous l’avenir ?
Les Tunisiens sont en train de construire une vraie démocratie, la première dans le monde arabe. Je souhaite que cela continue dans la transparence et la paix... Je ne suis pas surpris que les Frères musulmans aient gagné les élections. Il faudra juger sur pièces. Ils se disent modérés. Les Tunisiens ont changé, la parole s’est libérée. La population dit haut et fort ce qu’elle pense et ne cédera pas désormais.
Tahar Bekri
Croyez-vous à la force de la poésie ?
Ironie de l’histoire, j’ai commencé mon dernier recueil ‘‘Je te nomme Tunisie’’ en face de l’Ile de Groix, où Bourguiba a été en exil... Moi, je n’ai que ma plume pour dire la beauté du monde et dénoncer la violence. La voie du poète est d’être du côté de la vie. Du côté des Tunisiens qui se battent pour défendre la dignité humaine.
Propos recueillis par Hervé Queillé
Source : ‘‘Le Télégramme’’.