Mardi, on annonçait sur les réseaux sociaux une attaque imminente de groupes salafistes contre le siège de l’Union générale tunisienne du Travail (Ugtt), place Mohamed Ali, au centre-ville de Tunis. Kapitalis a été sur place pour vérifier…
Par Zohra Abid
«Regardez-moi ça, un journaliste a été bousculé et empêché de filmer les syndicalistes devant l’Ugtt et la police n’a pas bougé le petit doigt», crie un photographe indépendant.
L’homme était dans tous ses états. Il s’est précipité pour remettre sa caméra dans la sacoche après avoir trouvé refuge derrière une foule de gens, rassemblés au pied du mur en face du siège de l’Ugtt.
La guerre est dans les têtes
«Mais il ne s’agit pas d’un journaliste. Lui travaille pour le compte de la page facebook officielle d’Ennahdha. Nous le connaissons bien. Il est souvent là pour repérer des personnes précises», lui répond un syndicaliste. Et le photographe quinquagénaire de poursuivre: «Mais il travaille. C’est son gagne-pain. C’est tout comme moi, celui qui me paie, je lui fais le boulot et point final». Le syndicaliste s’est retiré calmement, sans prononcer un seul mot.
Cette scène s’est passée mardi vers 17H15, à la Place Mohamed Ali, au centre-ville de Tunis, devant le siège de la centrale syndicale, où il y a eu un rassemblement de quelque 150 personnes, des représentants syndicaux du corps de l’enseignement de base, déçus par la suite donnée par le gouvernement à leurs revendications.
«Après avoir négocié, nous avons accepté la proposition symbolique du représentant du gouvernement. Mais 1h30 après, le même représentant du gouvernement fait marche arrière et revient sur sa proposition concernant l’augmentation des salaires et des primes», a dit à Kapitalis l’un des instituteurs présents.
Les travailleurs devant leur maison.
«Vous empêchez le gouvernement de travailler!»
Devant le siège de l’Ugtt, quadrillé par les forces de sécurité, une vingtaine du côté de la rue Mongi Slim et autant du côté de la rue Mohamed Ali, les syndicalistes causent entre eux. Calmement. En face, à l’ombre du mur, d’autres personnes qui n’ont rien à voir avec le monde syndical. Nous les abordons. «Vous êtes en train de foutre de la m… dans le pays. Vous les journalistes, tous et sans exception, à vous mettre dans le même sac et jeter à la mer. Vous empêchez le gouvernement de travailler et vous ne cessez pas de chercher par tout moyen à lui mettre les bâtons dans les roues. Aujourd’hui, il n’y a pas mieux qu’Ennahdha pour assainir le pays. Espèce de corrompus, d’orphelins de Ben Ali…», nous a lancé une jeune dame, tirée à quatre épingles, bien coiffée, bien maquillée et le regard fou de rage. Elle est entourée de plusieurs personnes, mais beaucoup moins bavardes qu’elle. Dans les parages, malgré cet éclat de voix dont nous avons fait les frais, c’est plutôt calme. Les agents de sécurité présents sur la place suivent la scène en silence. Il n’y a vraiment rien à signaler.