L’économie tunisienne est à genoux, c’est un euphémisme. Et c’est le moment que choisit le président de la république pour prendre deux décisions qui risquent de la mettre KO.
Par Ridha Kéfi
A-t-on idée, en effet, de démettre le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (Bct), Mustapha Kamel Nabli, dont le seul tort est d’avoir défendu bec et ongles l’indépendance de l’Institut d’émission? Et de refuser, le même jour, de signer deux projets de loi relatifs à l’amendement de l’accord de création du Fonds monétaire international (Fmi) et à l’augmentation de la part de la République Tunisienne dans ce fonds, soit 258.700.000 de droits de tirage spéciaux?
Les deux décisions, aussi intempestives qu’indéfendables, prises apparemment sur un coup de tête, sans tenir compte des intérêts vitaux de la Tunisie, risquent de porter un coup à la crédibilité de notre pays.
On sait que le limogeage annoncé de Mustapha Kamel Nabli, un ex-haut fonctionnaire de la Banque mondiale, très respecté dans les milieux des finances internationales, n’a d’autre objectif que de mettre définitivement la Banque centrale sous la coupe du pouvoir exécutif. Ce qui est contraire à tous les principes de la bonne gouvernance politique et financière. Car même sous les dictatures de Bourguiba et Ben Ali, la Banque centrale a toujours gardé une certaine autonomie vis-vis du gouvernement. Autant donc le dire sans ambages: le limogeage de M. Nabli sera très mal apprécié par tous les partenaires et bailleurs de fonds internationaux de la Tunisie.
Avec la 2e décision, la Tunisie se tire carrément une balle dans le pied. Car, au moment où le pays – dont la note souveraine vient d’être dégradée de deux crans par Standard & Poors – a le plus besoin de financement extérieur pour relancer son économie grippée et impulser le développement des régions défavorisées, prendre une décision qui peut paraître hostile au Fonds monétaire international (Fmi) équivaut à un suicide.
Imprévisible et impulsif, populiste et démagogue, ignorant les arcanes de la finance internationale, et, surtout, pris au piège de ses petites guéguerres avec ses alliés d’Ennahdha (et néanmoins adversaires politiques en perspective de la prochaine élection), M. Marzouki est en train de nous faire dévaler la pente. Et, au rythme où vont (ou ne vont pas) les choses, le précipice n’est pas loin. Et dire qu’après chaque bêtise qu’il commet, ces chers sondeurs trouvent le moyen de faire remonter sa cote!