Mohamed Abbou n'en peut plus d'avaler des couleuvres. Il vient d'annoncer sa démission du gouvernement Hamadi Jebali, où il occupait jusque là le poste de ministre de la Réforme administrative.


M. Abbou estime qu'il ne peut plus assumer les missions pour lesquelles il a été nommé. Traduire: le gouvernement, tel qu'il fonctionne aujourd'hui, l'empêche de mettre en route les réformes que nécessite la situation, notamment dans les rouages de l'administration. Ce gouvernement n'a pas un agenda de réforme, celle-ci a cessé d'être sa priorité. Ce qui lui importe, à l'évidence, c'est de prendre en main tous les rouages du pouvoir de l'Etat.

M. Abbou avait déjà démissionné le 24 mai. Mais il a dû revenir sur sa décision pour ne pas créer une crise au sein de la "troïka", la coalition tripartite au pouvoir, rassembalant autour du parti islamiste Ennahdha, son propre parti, le Congrès pour la république (CpR) et Ettakatol. Mais la coalition étant déjà largement fissurée, rien ne s'oppose plus à sa démission.

"Après avoir présenté ma démission au chef du gouvernement le 24 mai, ce dernier m'a convoqué une semaine après pour me dire que je vais bénéficier des prérogatives qu'il faut dans ma mission. Il faut dire que le chef du gouvernement ne m'a rien donné par écrit. Et les dossiers de la corruption dans l'administration sont d'une rare ampleur et les corrompus sont toujours là, actifs... J'ai laissé derrière moi une équipe qui croit en l'assainissement de l'administration et elle va certainement continuer, mais moi j'ai préféré ne rien cautionner et m'intéresser des affaires du CpR", a lancé M. Abbou à un parterre de journalistes, samedi lors d'une conférence de presse au siège de son parti. Il était à côté de Khaled Ben Mbarek, l'un des conseillers à la présidence. Et d'ajouter, soulagé mais pas vraiment très à l'aise, que sa démission est "une affaire strictement interne" et qui n'a rien à voir avec le CpR qui reste un allié du gouvernement.

Le fait que M. Abbou n'ait pas présenté sa démission au chef du gouvernement, mais l'a annoncé au cours d'une conférence de presse, ce matin, au siège de son parti, est en soi le signe d'un grand dépit.

L'homme dont on connaît l'intégrité et le patriotisme ne peut plus, à l'évidence, continuer à jouer les faire-valoir et les utilités au sein d'un gouvernement qui fait tout de travers, et qui cherche plus à imposer la domination d'Ennahdha sur le pays, qu'à aider la Tunisie à sortir de sa crise actuelle.

I. B.