L’unité affichée par la «troïka» autour de la candidature de Chedly Ayari pour le poste de gouverneur de la Banque centrale ne saurait escamoter la faiblesse de cette candidature controversée. Et la poursuite des errements de la «troïka»…
Par Imed Bahri
L’Assemblée nationale constituante (Anc) se réunira en séance plénière, aujourd’hui, à partir de 13 heures, pour examiner la décision de nomination de Chedly Ayari au poste de gouverneur de la Bct, à la suite de la révocation injuste de Mustapha Kamel Nabli.
Un ex-Rcdiste à la rescousse
Le président de la Constituante Mustapha Ben Jaâfar avait levé, jeudi, la séance plénière consacrée à la même question dans un climat tendu et décidé, après concertations avec les présidents des groupes parlementaires, son report à aujourd’hui après-midi.
La candidature de Chedly Ayari ne fait pas l’unanimité, et c’est le moins que l’on puisse dire.
Cet ancien ministre de l’Economie de Habib Bourguiba présente beaucoup de défauts aux yeux de ses détracteurs. Il est âgé de 79 ans et s’est éloigné du monde des finances depuis, au moins, une vingtaine d’année.
Pis encore: il était membre du Rcd, ex-parti au pouvoir dissous, et a participé, par la plume, à la propagande de l’ancien régime de Ben Ali. Certains évoquent même les accusations dont il avait fait l’objet, dans une vie antérieure, lorsqu’il a dirigé, dans les années 1980, une banque africaine.
Pourquoi donc la «troïka», la coalition gouvernementale au pouvoir, et surtout le parti islamiste Ennahdha, qui crie haut et fort sa volonté de rompre avec les figures de l’ancien régime, s’entêtent-ils à soutenir la candidature d’un homme si controversé?
Une «troïka» est en panne de solutions
Il y a plusieurs réponses à cette question. D’abord, la «troïka» est en panne de solutions de rechange, car ni Ennahdha, ni le CpR ni Ettakatol qui la constituent ne disposent des compétences requises pour un tel poste. Ce qui, en soi, est assez inquiétant et donne une idée de la qualité de la coalition qui gouverne le pays.
Ensuite, M. Ayari a été approché par M. Ben Jaâfar avant que sa nomination officielle ne soit décidée par le président de la république, qui plus est, une semaine avant la révocation de son prédécesseur. Ce qui a constitué une entorse aux règles républicaines, mais c’est là une autre histoire que l’Histoire retiendra à la charge de Moncef Marzouki.
Le parti Ennahdha, qui n’a pas été associé au début à ce choix, s’y est d’abord opposé, par la voix de certains de ses députés, avant de s’y rallier pour préserver l’unité de la coalition gouvernementale. Cette coalition, qui étale au grand jour, depuis quelque temps, ses divergences, comme lors de l’extradition de l’ex-Premier ministre Baghdadi Mahmoudi par le chef du gouvernement sans consulter (ni même informer) le président de la république, a voulu éviter de se présenter en rangs dispersés à l’occasion de ce nouvel épisode.
En attendant la sanction des urnes
A l’évidence, la candidature de M. Ayari a été choisie à la hâte et elle est pour le moins discutable, mais les considérations avancées ci-haut semblent avoir sauvé le candidat d’une déroute certaine.
Il reste cependant à écouter les députés de l’opposition qui ne manqueront pas de décocher certaines flèches, cet après-midi, en direction d’une coalition gouvernementale qui fait tout à l’envers, multipliant les faux pas et les mauvaises décisions. En toute impunité, pour l’instant, en attendant la sanction des urnes lors des prochaines élections.