altSans coup férir, le ministre de la Justice Noureddine Bhiri remet en place le Conseil supérieur de la magistrature (Csm), sans consulter les organisations représentatives des magistrats.


 

Le Csm, dont les membres étaient en majorité nommés par la présidence de la république, est un détestable héritage du régime déchu. L’actuel garde des sceaux, du temps où il était un avocat opposé à Ben Ali, a longtemps manifesté contre cet instrument de contrôle de la magistrature. Une fois au pouvoir, ne voilà-t-il qu’il remet en selle cette détestable survivance d’une époque que l’on croyait révolu?

Une décision unilatérale

L’Association des magistrats tunisiens (Amt) a d’ailleurs rendu public un communiqué où elle dénonce cette décision unilatérale du ministère de la Justice, dont la volonté d’imposer son contrôle sur la magistrature n’a jamais été aussi criarde.

Ce «machin», qui devait être remplacé par une instance indépendante de la magistrature, a été remis en place pour entériner le mouvement dans le corps des magistrats au titre de l’année 2012-2013, décidé unilatéralement par M. Bhiri et ses collaborateurs et annoncé, jeudi après-midi, au siège du ministère de la justice.

C’est M. B’hiri qui a indiqué, lors du Conseil des ministres, que la mission de supervision du mouvement pour cette année a dû être confiée au Csm, en raison de la non-promulgation du projet de l’instance provisoire de la justice judiciaire par l’Assemblée nationale constituante (Anc), prétexte bien commode, sachant que le retard enregistré dans la promulgation de ce texte incombe essentiellement au gouvernement et aux manœuvres du parti Ennahdha au pouvoir.

La mainmise sur la magistrature est en marche

Selon le procureur général de l’Etat et rapporteur du Csm, Mohammed Affes, le mouvement au titre de l’année 2012-2013, qui concerne 771 juges, tous degrés confondus, a enregistré le départ à la retraite de 130 magistrats contre le recrutement de 50 jeunes diplômés de l’Institut supérieur de la magistrature (Ism).

Ce mouvement a obéi exclusivement à des critères objectifs, à l’instar de «l’ancienneté, de la compétence et de la volonté du juge», a assuré Affes.

Pour mieux faire dorer la pilule, M. Bhiri a embarqué le président de la république provisoire Moncef Marzouki dans sa manœuvre, en présentant à ce dernier, jeudi, au palais de Carthage les résultats des travaux du Csm concernant le mouvement dans le corps des magistrats au titre de l’année 2012-2013.

M. Marzouki, bien sûr, n’y a vu que du vent.

Argument que l’association des magistrats rejette en bloc, estimant que le parcours professionnels des juges (nominations, transferts, avancements, etc.) ne doit aucunement dépendre des décisions régaliennes du ministère de la Justice, mais d’une instance élue et indépendante.

L’Amt estime qu’à travers ce type de décisions unilatérales, l’actuel ministre de la Justice confirme la volonté du gouvernement Ennahdha d’imposer son contrôle direct sur le corps des magistrats et de reconduire l’ancien système d’une justice aux ordres.

Imed Bahri