Jarraya-Letaief: le match qui écœure les TunisiensChafik Jarraya, Blanche neige dans une république bananière, s'attaque à Kamel Letaief, Blanche neige aux pays des nains barbus. Ambiance d'une transition politique qui boîte dangereusement.

 

L'homme d'affaire Chafik Jarraya, qui est, comme on le sait, un enfant de chœur, ne tarit pas d'insultes à l'égard d'un autre homme d'affaire, enfant de chœur lui aussi, le très énigmatique Kamel Letaief. Les mots sont très choisis et dénotent de grandes qualités intellectuelles, morales et humaines. Jugeons-en...

«Kamel Letaief est un homme malade, complexé, inculte, et qui croit, au fond de lui-même, qu'il va fabriquer une nouvelle présidence», a déclaré Chafik Jarraya, aujourd'hui sur les ondes de ShemsFM, ajoutant que Kamel Letaïef «a participé au putsch du 7 novembre» (1987, Ndlr) ayant amené Ben Ali à la tête du pays, et qu'il est «un homme de renseignement qui a contribué à la torture des islamistes».

Non content d'avoir été très loin dans l'insulte et la dénonciation, Chafik Jarraya a ajouté à propos de son alter égo devenu son ennemi irréductible qu'il manipulait la Commission nationale d'investigation sur la corruption et la malversation (Cnicm), qui était dirigée par feu Abdelfattah Amor, avec le soutien de Ridha Belhaj, chef de cabinet de l'ex-Premier ministre Béji Caïd Essebsi (mars-décembre 2011), Me Imed Belkhamsa, membre de la Cnicm et le «petit entrepreneur» (sic!) Noureddine Ben Ticha, directeur du journal en ligne ''Al-Jarida''.

On remarquera ici, sans faire preuve de grande perspicacité, que les attaques de M. Jarraya contre M. Letaief ciblent aussi, indirectement, Béji Caid Essebsi, leader du parti Nida Tounes, une jeune formation qui monte et donne qui des cauchemars au parti islamistes Ennahdha.

Quant on sait que M. Jarraya, anciennement allié au clan de Ben Ali et Trabelsi, et aujourd'hui libre comme le vent, finançant même des feuilles de choux pro-Ennahdha et hostiles à l'opposition, on comprend les enjeux de cette basse polémique et on identifie les marionnettistes qui manipulent les fils de cette tragi-comédie.

On sait aussi qu'à la différence de son accusateur du jour, Chafik Jarraya, girouette professionnelle, changeant d'alliance au gré des vents, hier "trabelsiste" et aujourd'hui nahdhaoui, Kamel Letaief, qui fut l'ami de Ben Ali, est tombé en disgrâce en 1992 et a même subi les foudres de ce dernier (incendie de son bureau, saccage de sa voiture, etc.). Il aurait dû peut-être, après la chute de son ex-ami, se rallier à Ennahdha. Ce qu'il n'a pas fait. Au contraire: il a continué à soutenir les partis progressistes et libéraux (Nida Tounes, Al-Jomhouri, Al-Massar...)

C'est, sans doute, ce qui lui vaut les acrobaties judiciaires actuelles...

I. B.