La «Nuit des bougies» a drainé, mardi soir, des centaines de personnes à la Place Mohamed Ali, siège de l'Union générale tunisienne du travail (Ugtt). Les artistes et intellectuels se montrent solidaires de la centrale syndicale.
Par Zohra Abid
La nuit tombée, la Place symbolique était noire de monde. Universitaires, défenseurs des droits de l'homme, avocats, médecins, artistes de tout bord et autres représentants de la société civile étaient au rendez-vous avec leurs bougies allumées.
Ils sont venus le soir, pour exprimer leur solidarité avec l'Ugtt, dont le bureau exécutif était réuni, à l'intérieur du bâtiment, pour discuter des termes de l'accord obtenu avec le gouvernement sur l'annulation de la grève annoncée pour le jeudi 13 décembre. Les négociations, qui ont duré toute la journée, au palais du gouvernement, à la Kasbah, ont réuni 5 vice-présidents de l'Ugtt et 5 ministres.
Tout en essayant de s'informer de l'évolution de la situation, les manifestants faisaient de la musique, chantaient et alternaient pour faire des discours politiques...
Dans un autre coin, des hommes de théâtre déclamaient des poèmes; d'autres laissaient leurs empreintes sur les murs avec des graffitis; d'autres discutaient sagement de la situation dans le pays, des ratés du gouvernement et des pratiques autoritaires du parti Ennahdha (au pouvoir). D'autres sujets ont été imposés par l'actualité de ces derniers jours: les éléments d'Al-Qaïda déployés dans les régions frontalières avec l'Algérie et préparant (déjà) le jihad dans un pays, la Tunisie, qui était longtemps prémuni contre ce genre d'extrémisme!
De temps en temps, on entend des slogans hostiles au gouvernement, des appels à sa chute, et des rappels des récents évènements, notamment des affrontements à Siliana, et, surtout, des appels à la dissolution des «ligues de la protection de la révolution» considérées comme le bras armé du parti Ennahdha.
Un air de fête certes, mais l'inquiétude se lisait dans le regard grave de tous les présents.
Ici, la nuit est froide et longue. Après le «printemps de la révolution de la liberté et de la dignité», la crainte de «l'hiver islamiste» est bien réelle.