Il est, bien sûr, prématuré de désigner les meurtriers de Chokri Belaïd, leader du Parti des patriotes démocrates (Watad, gauche radicale), mais on peut toujours s'interroger sur les circonstances politiques de ce meurtre.
Le défunt est connu pour ses positions radicales et ses critiques virulentes du parti islamiste Ennahdha (au pouvoir). La veille même de sa mort, mardi soir, sur la chaîne Nessma TV, il lançait des accusations contre ce parti, qui laisse faire les groupes violents, telles que les Ligues de protection de la révolution, considérées comme ses milices. Ces Ligues, soutenues publiquement par les dirigeants d'Ennahdha, ont perpétré plusieurs attaques contre les partis de l'opposition (Nida Tounes, Parti Républicain, Front populaire) pour les empêcher de tenir leur meetings. En octobre dernier, elles ont causé la mort, à la suite d'un lynchage sur la place publique, de Lotfi Nagdh, dirigeant de Nida Tounes à Tataouine.
On ne peut, bien sûr, accuser aucune partie de ce meurtre en attendant les résultats de l'enquête policière, mais les faisceaux d'indices accablants sont là pour désigner l'identité politique des meurtriers.
D'ailleurs, les manifestants sortis protester contre ce meurtre dans plusieurs villes du pays, se sont rassemblés, spontanément, devant les sièges du parti Ennahdha, notamment à Béja. C'est qu'ils tiennent ce parti et ses dirigeants, qui assument la charge du gouverner le pays, pour responsable, sur le plan politique, du meurtre de l'un des dirigeants les plus populaires de la gauche tunisienne.
C'est, donc, à ce parti et au gouvernement qu'il conduit de réagir pour dissiper tous ces soupçons, rétablir le dialogue avec les autres forces politiques et aider à sortir le pays de l'impasse actuelle.
I. B.