L'Union pour la Tunisie brosse un tableau assez obscur de la situation actuelle dans le pays et, surtout, de ses perspectives incertaines sur les plans politique et économique : violence, insécurité, crise économique, peur de l'avenir...
Par Yûsra M'hiri
L'Union pour la Tunisie, coalition politique et électorale de centre-gauche créée récemment pour rééquilibrer une scène politique dominée par le parti islamiste Ennahdha, a tenu mardi une conférence de presse consacrée à évaluer la situation générale dans le pays et à souligner les problèmes entravant l'avancement du pays sur le chemin de la liberté, de la démocratie et de la prospérité.
Fin de légitimité pour le gouvernement
Taïeb Baccouche, secrétaire général de Nida Tounes, a ouvert le bal, en soulignant, sur un ton d'amertume, que le début de la fin de la légitimité et de la crédibilité de l'actuel gouvernement fût l'assassinat de feu Chokri Belaïd, leader du front populaire, qu'il a qualifié de «tremblement de terre».
L'évolution de la situation en Tunisie est suivie par le peuple comme un feuilleton sans queue ni tête, a dit M. Baccouche, ajoutant qu'il était temps de changer les choses. Or, en réalité rien de nouveau et de concret n'a lieu, aucune prise de décision en faveur du peuple n'est mise en œuvre par le gouvernement en place. «Nous ne sommes pas optimistes», a-t-il conclu.
Maya Jeribi, secrétaire générale du Parti Républicain, a repris le même élément sensé être déclencheur d'un changement ou, du moins, d'une prise de conscience de la gravité de la situation actuelle: l'assassinat de Chokri Belaïd, l'un des symboles de la liberté dans le pays. Elle a évoqué l'insécurité qui règne dans le pays, la recrudescence de la violence, devenue une banalité pour un peuple terré dans la peur. La violence verbale et physique allant, parfois, jusqu'à faire couler le sang, doit être stoppée en urgence par le ministère de l'Intérieur. Pour cela, ce département doit être dirigé par une personnalité qui se distingue par sa neutralité et son indépendance des partis politiques. D'autant que ce ministère, dirigé par le Nahdhaoui Ali Lârayedh, n'a jamais pu gagner la confiance des Tunisiens.
De gauche à droite: Mohamed Kilani, Taieb Baccouche, Abderrazek Hammami, Maya Jeribi et Samir Ettaieb.
Les appels au secours d'un peuple angoissé
Samir Ettaieb, porte-parole d'Al-Massar, a souligné lui aussi la responsabilité d'Ennahdha dans tous les maux actuels du pays: violence politique, insécurité, chômage, cherté de la vie, etc. Il a évoqué aussi son inquiétude face au retard enregistré dans la rédaction de la constitution et aux «absences» du président de l'Assemblée nationale constituante (Anc), Mustapha Ben Jaâfar, alors qu'il est censé optimiser le temps et accélérer le processus. Il en va de même pour Moncef Marzouki, le président provisoire de la république, qui n'assume pas, lui non plus, son rôle de chef d'Etat, malgré les limites de ses prérogatives.
Les leaders de l'Union pour la Tunisie ont donc dénoncé, d'une voix commune, la situation économique, politique, religieuse et sociale, s'inquiétant de l'inflation, de la hausse des prix des produits de première nécessité, de la violence et de l'insécurité, et justifiant les «cris de la rue», qui sont autant d'appels au secours d'un peuple qui s'est libéré de la dictature, et qui se retrouve dans la précarité.
«Ce cercle vicieux doit être rompu immédiatement. Car cela devient urgent», dira Mohamed Kilani, leader du Parti socialiste. Et pour ce faire, il faut tout d'abord arrêter de faire des promesses non tenues et de «balancer» des dates presque aléatoires pour les prochaines échéances politiques. Les partis au pouvoir seraient bien inspirés de dialoguer avec les partis de l'opposition et de prendre en compte leurs propositions. Car ces partis représentent également le peuple, et n'attendent qu'une seule chose, c'est que la «troïka» daigne répondre positivement à leurs appels au débat et à avancer sur les différents sujets qui enflamment la Tunisie.