A l'occasion de la Fête internationale de la femme, les Tunisiens ont lancé un message fort au gouvernement dominé par les islamiste d'Ennahdha : pas touche à nos libertés et droits!
Des milliers de femmes de divers horizons (syndicalistes, activistes politiques, fonctionnaires, artistes...), jeunes et moins jeunes, et de toutes les couches sociales, se sont rassemblées, samedi, à la Place Mohamed Ali à Tunis avant d'entamer une marche pacifique à l'avenue Habib Bourguiba pour exiger l'inscription dans le texte de la nouvelle constitution, en cours de rédaction, les droits politiques et socioéconomiques de la femme tunisienne tels que spécifiés dans les conventions internationales afférentes.
Hommes et femmes marchent ensemble pour la défense des droits des femmes.
Les droits des femmes dans le collimateur d'Ennahdha
Au cours de cette marche, organisée en marge de la célébration de la Journée internationale de la femme, célébrée le 8 mars de chaque année, les protestataires ont dénoncé la violence infligée aux femmes et toutes les formes de discrimination à son égard.
Elles ont aussi scandé des slogans hostiles au gouvernement et au mouvement islamiste Ennahdha, soupçonné de vouloir revenir sur les acquis de la femme et de soutenir les mouvements extrémistes religieux appelant à asservir la femme aux soi-disant exigences de la chariâ. Certains slogans appelaient à la constitutionnalisation de l'égalité totale entre l'homme et la femme dans tous les domaines.
Basma Belaïd Khalfaoui, veuve de Chokri Belaïd, leader du parti du Front populaire assassiné le 6 février dernier, a déclaré à l'agence Tap que la femme tunisienne est, aujourd'hui, menacée par un modèle sociétal conduit par des courants rétrogrades, estimant que l'assassinat de son mari s'inscrit dans le cadre de cette démarche. «La femme se trouve, également menacée par la pauvreté et la marginalisation en l'absence d'une vision politique claire», a-t-elle ajouté.
Les femmes et les hommes continueront de militer ensemble pour consacrer l'égalité totale entre les deux sexes.
Pour sa part, la militante Radhia Nasraoui, présidente de l'Organisation tunisienne de lutte contre la torture, a qualifié la situation de la femme tunisienne de «médiocre» en raison, a-t-elle dit, de la propagation du phénomène de la polygamie et des mariages coutumiers illégaux («ôrfi») dont le nombre s'élève, selon les estimations, à des centaines surtout chez les jeunes.
Mme Nasraoui a ajouté que la coalition majoritaire au sein de l'Assemblée nationale constituante (Anc) cherche à vider le Code du statut personnel, promulgué en 1956, de son contenu, se déclarant, toutefois, confiante que les femmes et les hommes continueront de militer ensemble pour consacrer l'égalité totale entre les deux sexes.
Fathia Saïdi, professeur de sociologie et membre du parti Al Massar, a estimé, de son côté, que deux ans après la révolution, les acquis et les droits de la femme sont en régression étant donné que les débats sont axés, en ce moment, sur des questions supposées relever des temps révolus tels que la polygamie et les mariages coutumiers.
Mme Saïdi a indiqué que la femme tunisienne a marqué l'histoire de son pays à travers les différentes époques, appelant à mettre en place les mécanismes nécessaires permettant de garantir l'application des lois progressistes promulguées pour préserver et garantir les droits de la femme.
Les ambiguités et le double langage d'Ennahdha nourrissent toutes les inquiétudes quant à la pérennité des droits et libertés.
Toute la vérité sur l'assassinat de Chokri Belaïd
Les participants à la marche parmi des défenseurs des droits de l'homme et des dirigeants politiques ont tous appelé à dévoiler la partie qui a planifié l'assassinat de Chokri Belaïd.
Des manifestations sont organisées, chaque mercredi, dans la capitale et plusieurs villes du pays pour exiger toute la vérité sur cet assassinat et ses commanditaires. Les manifestants expriment tous la crainte de voir l'enquête criminelle en cours détournée ou manipulée pour cacher la véritable identité des commanditaires de cet assassinat, qui a bouleversé les Tunisiens, non habitués à ce type de violence politique.
I. B. (avec Tap).