Rached GhannouchiLe président du parti islamiste vit décidément sur une planète et ses concitoyens dans une autre. Un fossé sépare désormais l'Etat islamiste, en cours d'être mis en place, d'une société tunisienne éprise de liberté et de progrès.

Rached Ghannouchi a déclaré que le gouvernement Ali Lârayedh «n'est pas le gouvernement Ennahdha, bien que ce soit Ennahdha qui conduit la coalition dont il est l'émanation».

Le chef du parti islamiste, qui parlait au cours d'une conférence de presse, vendredi, au bureau local de mouvement à la Cité Ettadhamen, à Tunis, a ajouté, que son parti «s'opposera à tout programme du nouveau gouvernement qui serait incompatible avec celui du mouvement Ennahdha».

M. Ghannouchi ne voit aucune contradiction dans ses propos : d'un côté, il affirme l'indépendance du gouvernement Lârayedh – «indépendance» à laquelle personne n'est obligé de croire –, et de l'autre, il précise – ce que tout le monde sait – que ce gouvernement n'a d'autres choix que de suivre les dictats d'Ennahdha.

Quelqu'un a-t-il parlé de parti-Etat?

Dans ce cadre, Ennahdha ne fait que reconduire, sous couvert d'alliance gouvernementale avec des partis soi-disant de centre-gauche (Congrès pour la république et Ettakatol), qui sont en fait de simples satellites du parti islamiste, le système du parti-Etat en vigueur sous l'ancien régime, et dont on connaît aujourd'hui le sort.

Quand un homme et un parti (Ghannouchi et Ennahdha), dont l'évolution idéologique et politique s'est arrêtée aux années 1960-1070, prennent le pouvoir dans un pays, cela creuse forcément un fossé entre l'Etat et la société.

C'est à ce fossé que les Tunisiens sont aujourd'hui confrontés, et qui risque de leur faire perdre de réelles opportunités de développement et de progrès dans un monde qui n'attend pas les attardés.

I. B.