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A l'incompétence, l'absentéisme, le manque de sérieux et l'excentricité, certains des membres de la Constituante viennent d'ajouter une autre tare : la rapacité. Des révélations mettent à mal la réputation déjà peu glorieuse des députés tunisiens.

Par Marwan Chahla

Les révélations faites par le constituant Mongi Rahoui du Groupe démocratique n'ont pas fini de s'amplifier. Lundi soir, c'était au tour d'Ahmed Souab, juge au tribunal administratif, de confirmer les propos de M. Rahoui et de rajouter une épaisse couche. Il s'agit, désormais, d'une bien plus grosse affaire: quatre ministres, nommés à leurs nouvelles fonctions, auraient cumulé pendant quelque temps deux salaires...

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Le député Mongi Rahoui persiste et signe en dénonçant ses collègues. 

Un tsunami au Palais du Bardo

Les propos de Mongi Rahoui, la semaine dernière, accusant ses collègues de l'Assemblée nationale constituante (Anc) de puiser trop avidement dans l'argent du contribuable, à un moment où tout le pays a du mal à joindre les deux bouts, continuent de faire des vagues. Et il pourrait bientôt s'agir d'un véritable tsunami qui balaierait tout le Palais du Bardo, emportant sur son passage «légitimité», crédibilité et représentativité de cette institution qui nous semblait être le plus précieux acquis de notre 14 janvier.

Lundi soir, lors de l'émission ''21 heures'' de nos confrères d'Ettounissia TV, une nouvelle bombe a été lâchée par un juge au tribunal administratif, Ahmed Souab, qui nous a révélé qu'il est en possession d'une correspondance confidentielle dans laquelle Mohamed Abbou, ancien ministre de la Réforme administrative, avait informé Mustapha Ben Jaâfar, président de l'Anc, que quarte élus ayant acquis le statut de ministres continuaient à percevoir leurs salaires de députés.

Le message de M. Abbou à Ben Jaâfar a été reçu et tu... Le président de l'Anc n'a donc pas donné suite à cette correspondance. Est-ce raisonnable? Est-ce acceptable? Est-ce légal?

Il devient ainsi clair que l'institution représentative à laquelle le peuple tunisien a confié la tâche «sacrée» de rédiger une constitution digne de sa révolution souffre de plusieurs dysfonctionnements. Depuis fort longtemps déjà, les médias ont dénoncé les nombreuses incompétences de nos représentants, leur lenteur, leur absentéisme et autres manque de sérieux et excentricité.

Nos constituants peuvent aussi aimer l'argent

A présent, il faudra peut-être se résoudre à ajouter à cette longue liste des carences et tares de la Constituante celle de la rapacité.

Mongi Rahoui peut être esseulé, mis en difficulté en incommodant certains de ses collègues de l'opposition, il peut se faire lyncher et traiter de tous les noms par la majorité, tout cela n'y changera rien: l'affaire est maintenant connue de tous et elle ne s'arrêtera pas là.

Une fois de plus, une raison de plus, pour les électeurs d'exprimer les plus profonds regrets d'avoir voté comme ils l'ont fait le 23 octobre 2011.

«Ils» peuvent craindre Dieu, mais nos constituants peuvent aussi aimer l'argent passionnément...

Illustration: le juge Ahmed Souab.