Ali Larayedh, chef du gouvernement provisoire, accuse l'opposition d'être un véritable obstacle pour la réussite de la transition démocratique, entravant le travail de son gouvernement qui se donne à fond... Vidéo.
Par Yüsra N. M'hiri
C'est désormais une rengaine : si rien ne fonctionne dans le pays, c'est de la faute des médias, qui ne rendent pas compte des exploits du meilleur gouvernement au monde. C'est, en tout cas, ce que répètent, à satiété, le président provisoire de la république, Moncef Marzouki, le chef du gouvernement provisoire Ali Lârayedh, le président d'Ennahdha, Rached Ghannouchi, et la plupart des dirigeants d'Ennahdha dans toutes leurs déclarations publiques.
Qui veut instaurer le chaos en Tunisie?
Ce qui, d'ailleurs, ne reste pas sans conséquence, puisque les journalistes sont souvent agressés par les foules hystériques des partisans d'Ennahdha et de ses alliés, lors de leurs manifestations publiques. Dernière agression en date, hier, vendredi, lors de la manifestation pro-Morsi organisée par les islamistes, à l'avenue Habib Bourguiba.
Ne dérogeant pas à cette tradition, M. Larayedh a accusé, dans une déclaration hier aux médias, «certaines forces sociales et politiques d'avoir appelé à l'insurrection et à la violence pour instaurer le chaos...»
L'opposition, qui tient le sit-in Errahil au Bardo, depuis l'assassinat du député Mohamed Brahmi, le 25 juillet dernier, appelant à la dissolution de l'Assemblée et du gouvernement provisoire et à la mise en place d'un gouvernement de salut national, est, d'après M. Larayedh, responsable des problèmes économiques du pays.
Belle leçon d'irresponsabilité de la part d'un chef de gouvernement qui s'accroche à son siège et refuse de reconnaître son incompétence et celle de son équipe.
N'est-ce pas sous le règne de M. Larayedh, comme ministre de l'Intérieur, que le dirigeant de gauche Chokri Belaïd a été assassiné, et comme chef de gouvernement, que le député de l'opposition Mohamed Brahmi a été assassiné aussi, par le même groupe d'extrémistes religieux? Pour moins que cela, et sous d'autres cieux, d'autres responsables politiques auraient présenté leur démission. M. Larayedh, qui a tout raté et dont le bilan est catastrophique dans tous les domaines (sécurité, économie, stabilité sociale, etc.), ne veut pas assumer ses responsabilités.
Un gouvernement empêché de réaliser des miracles (!)
Par un curieux raisonnement démagogique, M. Larayedh croit pouvoir affirmer que la crise actuelle en Tunisie, dont il est largement responsable, ne permet pas le changement du gouvernement, car cela pourrait, selon lui, ébranler davantage la stabilité du pays. En d'autres termes : le bateau est en train de couler, ne changeons pas le timonier qui a causé sa perte!
Selon son raisonnement, il conviendrait plutôt de dissoudre les organisations nationales, les partis de l'opposition, les associations sociales et les médias, qui empêchent le gouvernement de réaliser des miracles. Et pour cause : ces organisations, partis, associations et médias sont «trop politisés» (sic !) au goût dd M. Larayedh.
Drôle de posture, dictatoriale s'il en est, et qui n'aidera pas à trouver des solutions pour sortir le pays de la crise dans laquelle il s'enfonce chaque jour un peu plus à cause de l'incompétence, de l'arrogance et du jusqu'auboutisme d'un pouvoir sourd et aveugle, indifférent aux cris et aux appels d'un peuple au bord de la crise de nerfs.