Quelque deux cent policiers tunisiens ont manifesté mercredi devant le palais de justice de Tunis pour dénoncer une enquête ouverte contre un dirigeant de leur syndicat après qu'il a accusé des juges de collusion avec des jihadistes.
«Policier, réveille-toi, la justice se joue de toi», ont notamment scandé ces manifestants en civil. Mais aussi: «Sûreté républicaine, justice indépendante» ou encore «Syndicat, nous sommes tous avec toi». Trois représentants de L'Union nationale des syndicats des forces de sûreté tunisiennes (UNFST), Sahbi Jouni, Imed Belhaj Khlifa et Motassar Materi, sont convoqués entre mercredi et vendredi pour répondre aux questions d'un juge d'instruction au sujet d'une conférence de presse lors de laquelle ils ont notamment accusé des juges de libérer sciemment des jihadistes arrêtés par la police. «Le ministère publique a initié des poursuites à l’encontre du syndicat ayant dévoilé l'implication de juges et de responsables de la sécurité avec des terroristes», a indiqué à l'agence AFP l'avocat des représentants syndicaux, Lazhar Akremi. Cette enquête n'est pas la première à viser des responsables de syndicats des forces de l'ordre. Début septembre, Walid Zarrouk a été placé en détention provisoire et inculpé pour avoir accusé un procureur d'obéir aux injonctions des islamistes d'Ennahdha qui dirigent le gouvernement provisoire. Nombre de responsables syndicaux et de médias ont accusé Ennahdha d'avoir créé au sein de la Justice et de la police «un appareil parallèle» à son service, ce que le gouvernement a démenti à maintes reprises, alors que les faits semblent donner raison à ses accusateurs, comme dans la récente affaire du journaliste Zied El Heni. Tout cela est pour le moins inquiétant et préfigure des querelles opposants trois institutions: la sûreté, la justice et les médias, le gouvernement jouant le jeu, tour-à-tour, du manipulateur, de l'arbitre et de l'adversaire.
I. B. (avec AFP). Illustration: Les policiers manifestent devant le palais de justice de Tunis (capture d'écran). |