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«Bourguibien jusqu'à la moelle»: ce slogan pourrait servir d'unique programme à Omar Shabou, président du Mouvement des Destouriens libres (MDL). Or, avec la nostalgie, il y a toujours un risque d'anachronisme.

Par Marwan Chahla

Omar Shabou, président du Mouvement des Destouriens libres (MDL), a servi, mardi soir, aux spectateurs de Nessma TV le plat de «l'authenticité tunisienne du discours bourguibien», appelé «la famille destourienne à se réunir de toute urgence» et soutenu que, «pour l'instant, le programme (de son mouvement) n'est pas une priorité absolue». Bref, ce passage en prime time sur le terrain «nessmaoui», très amical envers M. Shabou, a permis de constater que le bourguibisme ainsi réchauffé ne peut pas faire recette et que le MDL, né le 6 mai dernier, fait du sur-place, tâte encore le terrain et tente toujours de se démarquer comme il peut de tous ceux qui, avant lui et après lui, ont eu l'idée d'essayer de tirer quelques avantages de l'héritage du Combattant suprême. Les uns comme les autres n'y voient aucun inconvénient, aucun nostalgisme, ni aucun anachronisme...

Contrat direct avec la Tunisie profonde

Invité par nos confrères de l'émission ''Ness Nessma'', Omar Shabou a fait un petit bilan des 6 mois d'existence du MDL et expliqué «les états d'âme» de la multitude destourienne qu'il a rencontrée lors de ses pérégrinations récentes à travers le territoire tunisien. «Vous les trouverez partout, dans toutes les ruelles et dans tous les quartiers. Et même s'ils ne se réclament nécessairement du Destour, ils aiment Bourguiba», assure-t-il.

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Le legs de Bourguiba est toujours vivant parmi les Tunisiens. 

M. Shabou, soulagé d'avoir découvert ce qu'il a découvert «dans ce contrat direct avec la Tunisie profonde», nous a également expliqué que cette majorité destourienne, qui s'est enfin libérée du complexe de culpabilité qui l'a sérieusement inhibée au lendemain de la Révolution, attend avec impatience la réunion de la famille destourienne. Pour lui, ces retrouvailles, face à la confusion sans nom de la situation présente du pays, sont devenues «une nécessité historique» absolue.

Ennahdha : une étrangeté en Tunisie

Au passage, et par souci très poussé de démarquage politique, le président du MDL ne s'est pas privé de décocher un certain nombre de flèches assassines. Il a réservé la plus acerbe de ses critiques à Hamed Karoui, dont il a épinglé surtout l'indécence d'avoir servi si religieusement le régime Ben Ali et de se réclamer aujourd'hui du bourguibisme, et de n'avoir pas vraiment clarifié sa position vis-à-vis d'Ennahdha. Pour le journaliste-devenu-politicien, la gauche, sous toutes ses formes et tendances, n'est qu'«importations et intrusions». Ennahdha, elle, outre ses innombrables fiascos, est une étrangeté qui n'a rien à avoir avec la Tunisie....

Seul Béji Caïd Essebsi échappe aux feux nourris de Omar Shabou: selon lui, le président de Nida Tounes est «bourguibien jusqu'à la moelle».

Le président des Destouriens libres laissera donc, une fois de plus, le téléspectateur sur sa faim: il ne dévoilera rien sur le programme de son mouvement. Il préférera plutôt parler de référentiel bourguibien, de vagues sentiments et impressions, d'une sensibilité, d'une méthode de travail, d'une structure mentale et d'une prédisposition destouriennes – toutes, donc, des notions et des concepts venus d'une époque révolue de l'histoire de notre pays. En somme, des généralités et des tâtonnements qui n'auraient aucune emprise sur les réalités de la Tunisie et les crises de la période post-révolutionnaire. Des formules qui auront du mal à trouver preneur auprès de ceux qui ont fait la Révolution et qui attendent toujours leur dû.