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Les manifestations, qui dégénèrent souvent en affrontements avec les forces de l'ordre, laissent la voie libre à des intrus pour incendier les commissariats de police et autres établissements publics. Et si l'anarchie profitait aux terroristes... VIDEO.

Par Yüsra N. M'hiri

Dans la soirée du mercredi 8 janvier, les forces de l'ordre ont dû poursuivre et tirer sur un groupe de terroristes qui a tenté de s'infiltrer dans une briqueterie dans la ville de Kasserine. Les échanges de coups de feu n'ont fait aucun blessé et les terroristes ont pu disparaître dans l'obscurité de la nuit.

Dans cette embuscade se trouvait un terroriste d'origine algérienne, Khaled Chaieb alias Lokman Abou Sakhr, recherché pour avoir participé à des actes terroristes à Kasserine. Ce dangereux terroriste, impliqué dans l'assassinat de plusieurs soldats et agents de la garde nationale au Jebel Chambi, en juillet dernier, a pu prendre la fuite. Il est activement recherché par les autorités policières qui ont diffusé, hier, son portrait.

Jeudi à l'aube, des individus ont tenté de prendre d'assaut le poste frontalier de Bouchebka, toujours dans le gouvernorat de Kasserine. Mais les agents de la garde nationale ont pu faire face à cette attaque et protéger leur poste où, on l'imagine, se trouvent des armes et des provisions, objets de l'attaque.

Plus tard, dans le courant de l'après midi, et alors que les heurts se poursuivaient à Kasserine, entre les manifestants et les forces de l'ordre, une voiture de police est tombée dans un fossé, au niveau de la cité Ennour. Les quatre agents à son bord, légèrement blessés, ont été transportés à l'hôpital régional pour y subir des soins. Des individus ont alors incendié le véhicule en criant «Allahou akbar» (Dieu est grand) en signe de victoire.

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Des soldats devant un poste de police incendié à Kasserine.

Ce comportement en dit long sur l'obédience idéologique de ces individus – et l'on hésite à parler de «citoyens» – qui considèrent les agents de l'ordre comme des ennemis, sinon comme des «taghout» (mécréants).

Ce même mot est, curieusement, utilisé, depuis quelques jours, par les pages islamiques dans les réseaux sociaux, pour qualifier les forces de l'ordre et les unités de l'armée nationale. Des internautes islamistes se réjouissent même ouvertement de la destruction des postes de polices dans plusieurs villes du pays, notamment à Thala, Kasserine et Tataouine.

«Les postes des taghout sont détruits. Ils sont dans une situation difficile. A nous la victoire»... «Cette fois-ci, c'est notre révolution. Nous finirons par vaincre et, une fois débarrassés des taghout, la charia (loi islamique, NDLR) sera imposée»... «L'islam est la solution. Nous sommes les soldats de Dieu. Ce ne sont pas les taghout qui assureront notre sécurité, mais la chariâ», lit-on, notamment, dans commentaires et statuts postés sur les pages islamistes.

Des habitants de Kasserine, qui prennent part aux manifestations depuis 4 jours, affirment ne pas être à l'origine des attaques et des incendies des postes de police et des établissements publics.

«Nous voulons construire et non détruire», disent-ils. «Protégez vos institutions! Ne brûlez rien! C'est un piège! Méfiez vous!», lançaient-ils en direction des jeunes. Cherchant à éviter que l'anarchie ne s'installe dans leur ville, ils disaient aux manifestants que l'objectif des mouvements est de dénoncer les inégalités régionales et l'abandon des régions de l'intérieur. «Nous voulons travailler, vivre, boire et manger. Nous voulons sortir de la misère», lançaient-ils aux journalistes qui venaient à leur rencontre.

Le ministère de l'Intérieur, qui craint que les groupes terroristes ne profitent de la situation pour essayer de créer l'anarchie dans le pays, a publié, jeudi, un communiqué où il demande à la société civile et aux partis politiques de condamner fermement les attaques répétées contre les postes de police. Tout en réaffirmant son engagement à garantir le droit de manifester pacifiquement et de protéger les manifestants, le ministère menace de poursuites judiciaires toute personne qui se rendrait coupable de tels actes

L'Union générale tunisienne du travail (UGTT) a averti, hier, contre l'existence d'intrus qui s'infiltrent parmi les manifestants pour commettre des destructions et des incendies dans le dessein de créer le maximum de désordre dans le pays.

Tout en soutenant les manifestations populaires contre les taxes imposées par la loi des finances 2014, les partis de l'opposition ne cessent d'insister sur le caractère pacifique de ces manifestations.