Le député Ibrahim Kassas (Gassas) est au bout de la crise de nerfs: après la violence à l'encontre de son collègue Mahmoud Baroudi (Alliance démocratique), le voilà qui demande à ce que l'on «se torche avec la constitution». VIDEO.
Par Yüsra N. M'hiri
Lors de la séance plénière d'avant-hier, Ibrahim Kassas, en désaccord avec son collègue Mahmoud Baroudi, et s'emportant contre le projet d'article 103 du projet de Constitution consacrant l'indépendance des magistrats vis-à-vis du pouvoir exécutif, a bondi de son siège, retiré nerveusement sa veste comme pour aller à la bagarre avec M. Baroudi: «Qu'est-ce qui te prend Mahmoud? Nous ne sommes pas des femmes? Moi je suis un homme!», lui a-t-il lancé, trahissant ainsi son machisme et sa misogynie. Il a fallu que ses collègues le retiennent et l'empêchent d'aller à l'affrontement, sinon on aurait pu assister à une bagarre.
M. Kassas a été interrogé, hier, par la télévision nationale, sur l'article 6 du projet de constitution pénalisant le «takfir» (accusation d'apostasie et mécréance). Ratant une nouvelle occasion de se taire, il a lancé à ses collègues avec des mots peu choisis: «Si l'on vote un article pareil, on entrerait en guerre contre Dieu et l'islam. Je vous emmerde. Quant à votre constitution, vous pouvez vous torcher avec».
Ibrahim Kassas cherche la bagarre avec son collègue Mahmoud Baroudi (capture d'écran).
Une semaine auparavant, le député a été à l'origine de la suspension des travaux de la plénière à l'ANC après avoir protesté violemment contre la non-perception de ses indemnités de députés, menaçant d'empêcher la finalisation de la constitution.
Ibrahim Kassas, originaire de Kébili (sud), est décidément un député atypique voire hors-norme: ancien chauffeur d'un véhicule de transport en commun, élu sur une liste d'El-Aridha Chaâbia, un parti populiste vaguement islamiste, avant de rejoindre le parti libéral Nida Tounes et d'en démissionner quelques mois après. «Je ne me suis pas retrouvé dans les partis, la politique n'est pas faite pour moi», a-t-il justifié, mais ses dernières interventions à l'Assemblée sont très conservatrices et ont même une connotation islamiste. A-t-il l'intention de louer désormais ses services à Ennahdha?
Qu'on l'apprécie ou que l'on déteste ses manières frustes, Ibrahim Gassas est un homme capable de dire un gros mot dans une radio, de danser dans une émission télévisée et tenir en public des propos très terre-à-terre sinon franchement ridicules et déplacés.
Il y a un mois, il a été la risée d'une grande partie des Tunisiens en exprimant, en pleine plénière à l'Assemblée, son étonnement de voir des agents de police des deux sexes, en faction au bord de la route, dans l'obscurité de la nuit. Et appelé le ministre de l'Intérieur à mettre fin à cette détestable mixité. «Un policier et une policière dans une voiture, la nuit, par un temps froid et pluvieux, qu'est ce qu'ils surveillent? Vous pensez qu'ils vont surveiller ou s'occuper d'autre chose», s'était-il indigné. Des députées ont réagi violemment à cette déclaration qui trahit un manque de respect pour les femmes en général.
Le député, qui semble un peu perdu dans le paysage politique tunisien, a affirmé récemment qu'il a hâte de reprendre ses anciennes activités. Au point où il est aujourd'hui, ce serait la meilleure chose qui puisse lui arriver.
Lorsque l'homme rentrera de nouveau dans l'anonymat, duquel il n'aurait jamais dû sortir, que restera-t-il de son passage à l'ANC, sinon le souvenir de quelques frasques, provocations et coups de gueule, souvent d'ailleurs déplacés et de très mauvais goût?