La majorité des Tunisiens voudraient tourner au plus vite la page Moncef Marzouki. Et pour cause: sa «présidence» – si ce mot n'est pas, dans son cas, exagéré – a été la pire qu'ils Tunisiens aient connue jusque-là.
Par Imed Bahri
Suite aux rumeurs sur l'annonce prochaine de la démission de Mustapha Ben Jaâfar de la présidence de l'Assemblée nationale constituante (ANC) pour se consacrer à la préparation de sa prochaine campagne électorale pour la présidentielle, le président provisoire de la république Moncef Marzouki ou «le maboul de Carthage», comme l'appellent certains de ses compatriotes, est pris d'une vraie panique, craignant d'être mis, par ses alliés d'Ennahdha et d'Ettakatol, dans l'obligation de choisir entre «démission», «renonciation» ou «limogeage» via un vote de défiance.
Un homme seul qui broie du vide
M. Marzouki est perplexe et ne sait plus sur quel pied danser, car s'il venait à démissionner, il n'aurait aucun rond pour financer sa campagne électorale, la trésorerie de son parti étant dans le rouge et les hommes d'affaires qui le finançaient jusque-là, comme Nasr Ali Chakroun (patron du groupe 3S), commencent à voir en lui un mauvais cheval de course. Ses décisions intempestives, ses déclarations à l'emporte-pièce et ses frasques en tous genres, ajoutés à ses scores très bas dans les sondages, ne plaident plus, il est vrai, pour lui. Désormais, peu de gens lui feraient confiance ou miseraient un sou sur lui, y compris et surtout parmi ses alliés islamistes.
En revanche, s'il préférait proroger son mandat, légalement fini le 23 octobre 2012, jusqu'à la fin de l'année en cours (pour clôturer ses 3 ans, comme il l'a déjà réclamé en octobre 2011), de manière à profiter de sa position privilégiée au Palais de Carthage et des moyens de l'Etat pour faire sa prochaine campagne électorale, il serait vraisemblablement déclaré inéligible par les instances compétentes.
Un homme du passé
M. Marzouki peut continuer donc à s'agiter, à multiplier les passages médiatiques – souvent d'ailleurs à sa demande, puisque les médias le snobent et ne voient plus en lui un bon client –, ou à faire durer un faux suspense sur sa très probable candidature à la présidence de la république. Il sait très bien, même s'il refoule cette vérité au plus profond de son inconscient, que, pour la majorité des Tunisiens, il appartient déjà au passé. Et pour cause: sa «présidence» – si ce mot n'est pas, dans son cas, exagéré – a été la pire que les Tunisiens aient connue jusque-là. Car même Zine El-Abidine Ben Ali, comparé à l'ex-défenseur des droits de l'homme qui s'est découvert un gros appétit de pouvoir et de privilèges, passerait désormais pour un chef d'Etat respectable. En politique, difficile de faire pire...