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Mine de rien, Moncef Marzouki vient de lancer sa campagne électorale pour la prochaine élection présidentielle en occupant, lui et ses collaborateurs, l'espace médiatique.

Par Moncef Dhambri

La compétition politique saine et juste, dans une véritable démocratie qui accorde une chance égale à tous les rivaux, devrait consister en une distribution impartiale et équitable du temps et de l'espace médiatiques entre tous les prétendants au pouvoir. Dans la soirée de dimanche dernier, deux de nos chaînes de télévision n'ont pas respecté cette règle élémentaire du jeu démocratique: Moncef Marzouki et Adnène Manser, les numéros 1 et 2 du Palais de Carthage, ont eu une occasion en or, sur la Watania 1 et Ettounsia, de défendre à loisir les thèses de la présidence provisoire de la République, d'accaparer pendant près de trois heures l'attention du public et de distiller leurs lieux communs.

L'art de mettre le feu à la baraque

La campagne pour les présidentielles de 2014 (?), dont ni les conditions ni la date n'ont été fixées, a bel et bien commencé. La Haute autorité indépendante pour la communication audiovisuelle (Haica) en est-elle vraiment consciente? Se saisira-t-elle, avant qu'il ne soit trop tard, pour mettre de l'ordre dans la maison médiatique tunisienne?

Il ne s'agit pas, dans cette réflexion, de reprendre point par point ce que Moncef Marzouki et son bras droit, Adnène Mansar, ont débité dans la soirée de dimanche sur la Watania 1 et Ettounsia pour démontrer qu'ils nous ont servi des plats réchauffés ou qu'ils continueront toujours à défendre l'indéfendable...

Depuis plus de deux années déjà, nous avons eu les innombrables occasions de constater les inadéquations infinies de l'ancien droit-de-l'hommiste, qui est passé professionnel dans l'art «de mettre le feu à la baraque» et du buzz, et les équilibrismes de son second au Palais de Carthage, qui se tue quotidiennement à la tâche du sauvetage des meubles.

L'un et l'autre ont donné amplement la preuve que l'Histoire peut faire des erreurs aussi énormes qu'une victoire à une élection à une constituante (de quelques petits milliers de voix!) peut donner le droit à des pouvoirs exécutifs.

N'ayant eu que des prérogatives infimes (d'aucuns s'exclameraient: Dieu merci!), le locataire du Palais de Carthage a remué ciel et terre pour se faire entendre et se faire remarquer par tous moyens. Ce faisant, les erreurs commises par Moncef Marzouki, ses maladresses inégalables et ses bévues irréparables se ramassent à la pelle au point d'avoir déjà fourni assez de matière pour un livre et elles pourraient, à l'avenir, servir de sujets de recherches doctorales.

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L'entretien commandé et kournaliste "réquisitionné" pour servir la soupe. 

Ayant occupé le plus clair de son temps à faire et à dire ce qu'il a pu et voulu pour que l'on parle de lui, ayant raté les nombreuses occasions de se taire et de se terrer dans le palais de ses rêves, l'heure pour Moncef Marzouki est au bilan, au désastreux bilan de cette présidence provisoire de la République, de ce parcours néfaste, de cet itinéraire où il n'a fait que collectionner les échecs.

Une offensive maladroitement orchestrée

Ainsi, devient-il évident que ce à quoi nous avons eu droit à la télévision, dimanche soir, faisait partie d'une offensive maladroitement orchestrée par le Palais de Carthage pour (re)conquérir la sympathie de l'opinion publique et lancer, avant les autres concurrents et dans des conditions meilleures, la campagne de M. Marzouki pour les prochaines présidentielles. Et il en sera ainsi jusqu'au jour où la Haica réalise l'étendue des dégâts que cette «liberté d'expression» de la présidence provisoire de la République peut engendrer...

Des interventions télévisées de ce genre devraient, désormais, être chronométrées à la minute et à la seconde près, pour que chacun des prétendants à la présidence de la République obtienne ce qui doit lui revenir et pour que les téléspectateurs n'aient pas à «se farcir», par exemple, les détails du bulletin de paie de M. Marzouki: son salaire brut mensuel de 30.000 dinars dont il ne garderait au bout du compte que le dixième, c'est-à-dire 3.000 dinars seulement. Avouons-le, pareille confession faite par Adnène Manser à notre confrère Samir El-Wafi, lors de son émission ''Pour qui ose seulement'' de dimanche soir, a de quoi faire pleurer dans les chaumières tunisiennes... et, peut-être, faire avaler la pilule des échecs cuisants du locataire du Palais de Carthage.

Que M. Marzouki présente sa démission en bonne et due forme, qu'il déclare officiellement sa candidature aux prochaines présidentielles et qu'il entame sa campagne, à ses frais et aux frais de son Congrès pour la République (CpR). Alors, la Haica prendra les dispositions nécessaires et réglementera ses prises de parole et celles de ses rivaux, sur les terrains de la neutralité, de l'indépendance et de la transparence.

Bien évidemment, tout cela ne se réalisera que sous la pression de la société civile pour que M. Marzouki comme M. Ben Jaâfar, le président de la Constituante, cèdent les avantages dont ils bénéficient par rapport à leurs concurrents dans cette course pour un mandat présidentiel complet.