La plupart des partis politiques tunisiens se sont indignés de la condamnation à mort, en Égypte, de 529 membres de l'organisation des Frères musulmans, au terme d'un procès expéditif de 2 jours.
Par Yüsra N. M'hiri
En réaction à ce verdict, des députés tunisiens ont dénoncé, aujourd'hui, à l'Assemblée, des procédures judiciaires injustes et irrespectueuses des libertés.
Samia Abbou (Courant démocratique) a demandé de consacrer une plénière à ce sujet et dénoncé le silence des médias tunisiens face à une pareille injustice.
Pour une révision du procès
Ahmed Brahim (Al-Massar) a appelé toutes les forces éprises de liberté et de démocratie à constituer un seul front contre la peine de mort. «Il faut s'indigner, c'est une honte. La Tunisie ne doit pas garder le silence face à ce crime», a-t-il déclaré.
Al-Massar a, dans un communiqué, rappelé les vertus du dialogue, qui est essentiel à la construction de la démocratie. Il a également exhorté les autorités égyptiennes à ne pas recourir aux procès iniques qui risquent de diviser davantage le peuple. Seul le dialogue permettra d’assurer la réussite de la transition démocratique et la réunification des Egyptiens.
Iyed Dahmani (Al-Jomhouri) a estimé, de son côté, qu'il fallait appeler les autorités égyptiennes à revoir d'urgence ce procès. «Nous sommes des démocrates, nous ne pouvons accepter une pareille sentence. L'armée égyptienne cherche à réinstaurer la dictature dans le pays», s'est-t-il indigné.
Le parti islamiste Ennahdha a appelé, dans un communiqué, les autorités égyptiennes à annuler le jugement et demandé aux organisations de défense des droits humains à se mobiliser et à voler au secours des condamnés, ainsi que des «partisans de la légitimité (traduire: partisans de l'ex-président Mohamed Morsi, NDLR) qui sont, systématiquement et injustement, maltraités et souvent tués dans les manifestations» (dixit Ennahdha).
Le parti Afek Tounes a publié un communiqué, mardi, où il affirme que «les forces démocratiques, quelles que soient leurs références intellectuelles, ne peuvent qu'exprimer leur indignation et leur refus catégorique de ce grave précédent et de ce verdict prononcé contre des adversaires politiques du pouvoir en place». Le parti de Yassine Brahim a appelé, par ailleurs, à «revoir toutes les circonstances de ce procès».
Une «boucherie judiciaire»
Joint par Kapitalis, Hamma Hammami, leader du Front populaire, a dénoncé, lui aussi, ce jugement, qu'il a qualifié de «boucherie judiciaire» et appelé à revoir le procès et à juger les prévenus de manière individuelle.
«Le Front populaire, malgré son hostilité aux Frères musulmans et à leurs pratiques violentes et sanglantes, estime que ce jugement est un règlement de compte et nous nous y opposons fermement», a-t-il dit.
Pour lui, ce verdict expéditif est inacceptable. «En deux jours, il est impossible de recueillir les preuves et d'écouter tous les inculpés. L'équité et la démocratie exigent des procès individuels, en phase avec les droits de l'Homme», a ajouté M. Hammami.
Le Front populaire appelle, par ailleurs, les forces démocratiques et la société civile en Egypte à poursuivre la lutte pour la liberté et contre la dictature, qu'elle soit celle des Frères musulmans ou de l'armée.
Al-Qotb, parti membre du Front populaire, a réitéré, dans un communiqué, son opposition à la peine de mort, «une sentence qui va à l’encontre des droits de l’Homme». «La liquidation physique au nom de la loi et des divergences idéologiques, dont le Front populaire avait fait les frais (par allusion aux assassinats de Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, NDLR), ne fait qu’envenimer la situation. Il est, dès lors, essentiel que les autorités égyptiennes revoient le procès», a indiqué ce parti de gauche.
Rappel des faits : lundi 24 mars, un tribunal égyptien a prononcé la peine capitale contre 529 membre de l'organisation des Frères musulmans, pour des violences commises en août dernier, à Al-Minya, à 250 kilomètres au sud du Caire, lors des manifestations pro-Morsi. Des agents de l'ordre ont été tués et des établissements publics saccagés et brûlés lors de ces événements.