Les autorités des Seychelles ont renouvelé le permis de séjour de Sakher El-Materi et sa famille, justifiant leur décision par leur manque de confiance dans la justice tunisienne. Mais que fait donc Moncef Marzouki et sa folklorique et impuissante diplomatie?
Par Marwan Chahla
Mardi, les autorités seychelloises ont décidé d'accorder un nouveau permis de séjour à Sakher El-Materi. Ainsi, le gendre du dictateur déchu et sa famille disposent d'un sursis d'une autre année dans cet archipel de l'Océan indien où ils résident légalement depuis février 2013.
Une fois de plus, le ministère seychellois des Affaires étrangères avance les mêmes raisons pour justifier le nouveau refus de Victoria d'extrader Sakher El-Materi vers la Tunisie et sa décision «de lui accorder une extension de séjour de douze mois, ainsi qu'à son épouse, leurs trois enfants et leur entourage».
Les autorités seychelloises déclarent avoir été convaincues par les preuves présentées par les avocats de Sakher El-Materi, selon lesquelles leur client «risque encore de ne pas recevoir un procès équitable s'il est remis à la justice de la République de Tunisie».
Etayant leur refus d'extrader Sakher El-Materi, les autorités seychelloises expliquent que «la République des Seychelles, qui n'impose ni ne reconnait la peine capitale, demeure peu convaincue que la République de Tunisie ne requerrait pas la peine de mort» contre le gendre fugitif de Ben Ali.
La fuite de Sakher El-Materi l'a tout d'abord mené au Qatar, à la veille de la chute du régime de son beau-père, mais, lorsqu'en septembre 2012 l'émirat du Golfe a décidé de l'expulser, il décida de trouver refuge aux Seychelles où la famille de l'ancien dictateur avait pour habitude, avant la Révolution, de passer des vacances.
Sakher El-Materi a été condamné par contumace à une peine de 16 ans d'emprisonnement et une amende de 97 millions de dinars pour corruption et biens mal-acquis.
Marié à Nesrine Ben Ali, la fille ainée du président déchu, Sakher El-Materi, homme d'affaires omniprésent sous l'ancien régime et dont le nom était souvent cité comme successeur très probable du dictateur, a perdu au lendemain de sa fuite tous «ses» biens en Tunisie, par décisions judiciaires de leur confiscation ou leur placement sous gestion de l'Etat tunisien.
Il y a fort à parier que, l'année prochaine à pareille date, une dépêche d'agence répètera cette même information que Sakher El-Materi a bénéficié d'un nouveau titre de séjour seychellois.
En définitive, les mêmes causes produiront les mêmes effets: une diplomatie «faible» et très peu convaincante et un dossier judiciaire mal préparé ne seront jamais de bons défenseurs d'un peuple spolié.
Moncef Marzouki, le président provisoire de la République, et Rafik Abdessalem, l'ancien ministre des Affaires étrangères, sont pour beaucoup dans les échecs de la politique étrangère tunisienne et son incapacité à obtenir l'extradition des Ben Ali et Trabelsi – et autres «recherchés» - pour les juger.