9-avril-1938-TunisLe peuple tunisien célèbre, mercredi, les événements du 9 avril 1938 (22 morts, 150 blessés), tournant décisif dans l'histoire du mouvement de libération nationale.

Ces événements douloureux avaient engagé l’étape décisive ayant abouti à la proclamation de l'indépendance, le 20 mars 1956, et de la république, le 25 juillet 1957. Ils s'étaient déclenchés à la suite des manifestations de milliers de Tunisiens, toutes catégories et générations confondues, dans les différentes régions du pays, pour revendiquer des réformes politiques, dont l'institution d'un parlement tunisien permettant au peuple d'exercer sa souveraineté nationale.

Le 10 mars 1938, Ali Belhouane, que l'on surnommera le «leader de la jeunesse», donne une conférence sur le «rôle de la jeunesse dans la bataille de libération nationale» à laquelle assistent 700 élèves de différents établissements scolaires.

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Manifestation du 9 avril 1938 réprimée dans le sang par les autorités coloniales françaises.

Réuni les 13 et 14 mars, le conseil national du Néo-Destour, parti nationaliste créé 4 ans plus tôt, adopte une motion appelant à la poursuite des manifestations, au non paiement des impôts et au boycott du service militaire. Belhouane est congédié du Collège Sadiki où il enseigne.

Ayant eu vent de ces activités, les autorités du protectorat anticipent en procédant à l'arrestation de Youssef Rouissi, Hédi Nouira, Salah Ben Youssef et Slimane Ben Slimane, accusés d'incitation à la haine raciale et d'atteinte aux intérêts de la France en Tunisie.

En représailles, le Néo-Destour organise, le 7 avril, une manifestation, rassemblant 2.500 personnes devant le palais beylical d'Hammam Lif.

Mongi Slim, membre du conseil national du Néo-Destour, parvient à rencontrer le bey et sollicite son intervention en vue d'obtenir la libération des responsables emprisonnés. Ne voyant rien venir, le Néo-Destour décide d'appeler à une grève générale le 8 avril.

Le même jour, une grande manifestation conduite par Slim et Belhouane s'ébranle du quartier de Halfaouine, à Tunis, et se dirige vers le siège de la résidence générale. Devant une foule de 10.000 personnes, Belhouane déclare: «Nous sommes venus aujourd'hui démontrer notre force [...] celle de la jeunesse qui ébranlera le colonialisme [...] Le parlement tunisien ne sera créé que par le martyr des militants et les sacrifices de la jeunesse...»

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Ali Belhouane: «Nous sommes venus aujourd'hui démontrer notre force [...] celle de la jeunesse qui ébranlera le colonialisme.» 

Avant la dispersion pacifique des manifestants, grâce à l'action de Mahmoud El Materi, Mongi Slim rappelle, dans un discours, les revendications du Néo-Destour et annonce l'organisation d'une deuxième manifestation pour le surlendemain, 10 avril.

Entre-temps, Belhouane est convoqué par le juge d'instruction pour le 9 avril. Une foule immense se rassemble devant le Palais de Justice où les forces de l'ordre accourent et commencent à tirer en l'air dans le but d'effrayer les manifestants. Des heurts sanglants éclatent ensuite et se soldent par 22 morts et près de 150 blessés.

Le résident général se rend auprès du bey et promulgue une loi instaurant l'état de siège à Tunis, Sousse et dans le Cap Bon.

Le lendemain, Habib Bourguiba et Mongi Slim sont arrêtés et traduits, avec le reste des dirigeants du Néo-Destour, devant le Tribunal militaire pour complot contre la sûreté de l'Etat.

Le Néo-Destour est dissous le 12 avril, ses locaux fermés, ses documents confisqués et la presse nationaliste suspendue. Ses drigeants et militants entrent alors dans la clandestinité.

Ce sera l’un des derniers tournant qui vont mener la Tunisie à l’indépendance, la voie ayant été tracée par le sang de ses martyrs, ceux-là même dont on célèbre la mémoire, le 9 avril de chaque année.

Source : Tap.