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Les partis engagés dans le dialogue national, et qui pensent fort aux prochaines élections, sont-ils capables de placer les intérêts du pays au-dessus des leurs?

Par Marwan Chahla

 

Le Dialogue national a repris aujourd'hui. Le Quartet et les formations politiques prenant part à cette conférence devront se déterminer, au plus vite, sur cette épineuse question de la séparation des deux scrutins ou leur concomitance. L'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), nous dit-on, est prête pour les deux scénarios. Elle n'attendrait plus que le feu vert de la Constituante pour mettre à exécution son plan d'action. Et la date-butoir de la fin de l'année, ainsi qu'elle a été prévue par la nouvelle constitution, serait respectée.

Sortir le pays des impasses

Des dates précises pour les prochaines élections présidentielle et législations doivent être fixées de toute urgence. En effet, il y va de la crédibilité de tout ce que notre pays a entrepris de plus positif depuis près de 3 ans. Nous réalisons, chaque jour encore plus, que le scrutin du 23 octobre 2011 a été un coup d'essai qui n'a que très peu convaincu. Nous nous sommes rendus compte que la tristement célèbre «légitimité électorale» de l'Assemblée nationale constituante (ANC) n'a que trop duré, qu'elle a été une usurpation du pouvoir, qu'elle a coûté à notre pays un argent et du temps très précieux et qu'elle a placé aux commandes des affaires de la Tunisie les incompétences des gouvernements Troïkas 1 et 2.

Pour sortir le pays des nombreuses impasses dans lesquelles il se trouve aujourd'hui, pour que les beaux rêves suscités par la Révolution ne se transforment pas en cauchemars et en désillusions amères, des élections libres, indépendantes et transparentes aideront le peuple tunisien à voir plus clair, à mieux choisir son destin et devront permettre, enfin, à l'Etat et à ses institutions d'être opérationnels et de fonctionner normalement.

En définitive, ces élections feront la pluie ou le beau temps de notre 14 janvier. Leur tenue, leur déroulement, leur réussite ou leur échec, et leur issue détermineront le reste du parcours de ce qui a été jusqu'ici la plus belle expérience politique du 21e siècle.

Dialogue-national-Fatiha

Les participants au Dialogue national récitent la Fatiha, au début de leurs travaux, à la mémoire des 4 martyrs de l'attaque terroriste de Kasserine.

Tout le monde en Tunisie, ou presque, est conscient de l'importance de ces échéances électorales. A l'extérieur, également, nos frères, nos amis et nos ennemis suivent de très près notre transition... Les uns applaudissent le génie tunisien et nous souhaitent bon vent, les autres... complotent et nous veulent du mal.

Après une interruption d'une vingtaine de jours, le Dialogue national reprend et redonne de l'espoir à notre Révolution. Rien n'est cependant acquis: les partis qui sont autour de la table des discussions, s'il est vrai qu'ils s'accordent sur l'absolue nécessité d'inventer le consensus satisfaisant, campent toujours sur leurs positions et n'ont jamais cessé de faire monter les enchères.

D'une manière générale, trois tendances se sont dégagées: Ennahdha s'est clairement prononcé pour la concomitance des deux scrutins; le Front populaire a opté pour la séparation des législatives et de la présidentielle; et Nida Tounes, par choix tactique ou en raison des divergences internes qui le minent, «attend de voir»...

L'Union générale tunisienne du travail (UGTT), principal acteur du Quartet et protagoniste-clé du Dialogue national, préfère s'en tenir à l'essentiel: le temps presse, nous dit-on à la Rue Mohamed Ali, les saboteurs du processus viennent de frapper très fort à Kasserine, la marge de manœuvre de l'ISIE se rétrécit chaque jour encore plus et la Constituante pourrait encore jouer aux trouble-fête et faire trainer les choses.

L'avertissement de l'UGTT

Hier, Bouali Mbarki, le secrétaire adjoint de la centrale syndicale, dans une interview téléphonique qu'il a accordée à Mosaïque FM, a rappelé cette vérité première de l'étape actuelle: «L'expérience douloureuse que notre pays vient de vivre (l'attaque du domicile du ministre de l'Intérieur Lotfi Ben Jeddou à Kasserine qui a coûté la vie à 4 agents de la sécurité, NDLR) devrait nous inciter tous – les partis politiques, les organisations nationales, les composantes de la société civile et tout le peuple tunisien – à nous unir, nous accorder et faire montre d'une détermination ferme à respecter les rendez-vous pris et à défendre avec force les acquis de notre Révolution. Ce serait la meilleure réponse que le pays pourra donner à ces terroristes qui souhaitent mettre un coup d'arrêt à la transition, à brouiller les cartes et à faire capoter le processus électoral».

M. Mbarki met en garde: «Que les choses soient bien claires. Toutes les parties (présentes au Dialogue national, NDLR) doivent assumer entièrement leurs responsabilités et respecter leurs engagements envers le peuple, pour que ces élections se tiennent normalement et dans les délais fixés par la Constitution».

L'avertissement de l'UGTT ainsi exprimé suffirait-il pour convaincre les «compétiteurs» des prochaines élections à placer les intérêts de la Révolution et du pays au-dessus de leurs calculs politiques et des égocentrismes politiciens?

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