La nuit du samedi à dimanche a été moyennement agitée. Le calme est loin d’être revenu, mais l’amélioration de la situation sécuritaire est perceptible. De quoi regarder la suite avec espoir.


Les Tunisiens sont-il en passe de gagner leur pari révolutionnaire? L’après-Ben Ali est, en tout cas, en train de se mettre en place. Dans la douleur certes, mais les prémices du renouveau national sont évidentes.
La montée en première ligne de l’armée nationale, longtemps maintenue à l’écart de la vie publique, est perçue comme une garantie par l’opinion tunisienne, qui ne fait plus confiance aux autres institutions républicaines, factices et surtout représentatives des dérives de l’ancien régime.
Sur le plan politique, le Premier ministre Mohamed Ghannouchi est en train de négocier avec les représentants des partis politiques et de la société civile pour constituer un gouvernement d’union nationale et discuter des réformes à mettre en place pour organiser les élections législatives et présidentielle dans un délai de deux mois.

L’épouvantail islamiste ne fonctionne plus
Les allégations de certaines parties – toujours les mêmes, les benalistes de la première (et de la dernière) heure – sur le danger d’un retour des islamistes sont non seulement non fondées, mais elles cherchent à créer un sentiment d’inquiétude injustifié dans l’opinion nationale et internationale.
Que les islamistes aient une place dans la Tunisie de demain, cela est dans l’ordre (démocratique) des choses. Il est normal que ce mouvement, qui a subi le plus durement les atrocités de l’ancien régime, soit réhabilité et retrouve sa place naturelle sur l’échiquier politique. Mais que les oiseaux de mauvais augure se taisent: les Tunisiens sont assez mûrs pour savoir ce qui convient le mieux à leurs intérêts. Et il est peu probable qu’ils confient un jour leur destin aux islamistes. Il suffit, à cet égard, de se rappeler des slogans agités par le  mouvement ayant chassé Ben Ali du pouvoir pour avoir la certitude de la portée démocratique et libérale de ce mouvement.
Ben Ali a agité, 23 ans durant, l’épouvantail islamiste pour justifier la chape de plomb qu’il a posé sur un peuple pacifiste, progressiste, épris de liberté et de justice. Cet épouvantail, longtemps agité aussi par les idéologues du régime et ses porte-voix, à l’intérieur et à l’extérieur, tous grassement payés du reste, n’effraie plus personne aujourd’hui dans cette Tunisie unie et solidaire, et qui goûte aujourd’hui à l’ivresse de la liberté retrouvée.
Les islamistes auront sans doute une place dans la Tunisie démocratique et libérale de demain, mais juste la place que leur donneront les urnes. Tâchons seulement pour que celles-ci soient, pour la première fois dans l’histoire du pays, la juste expression de la volonté souveraine de tous les Tunisiens.

Ridha Kéfi