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Le tombeau du Prophète Mohamed risque d'être détruit et les restes de la dépouille du Prophète transférés dans une tombe anonyme.

Par Marwan Chahla

C'est ce qu'a révélé, cette semaine, le quotidien d'Irlande du nord ''The Belfast Telegraph'' (''BT''). Si le plan de ce transfert est mis à exécution, selon Andrew Johnson, l'auteur de cet article, cela risque d'engendrer un inévitable schisme au sein du monde arabe – une autre déchirure dont la oumma musulmane pourrait se passer.

Le ''BT'' a obtenu une copie des recommandations soumises par un universitaire auquel les autorités saoudiennes ont fait appel pour consultation sur ce projet de transfert du tombeau du Prophète. Le document en question a été remis au groupe de superviseurs d'Al-Masjid Al-Nabawi à Médine, qui abrite la tombe du Prophète sous sa très célèbre Quba Khadhra, le Dôme Vert.

Un plan de transfert controversé

La décision ultime sur cet important sujet revient, bien évidemment, au Roi Abdallah Ibn Abdelaziz al-Saoud, le Gardien des Deux Saintes Mosquées.

Le plan de ce transfert controversé, révélé par un autre académicien, qui a critiqué la destruction des lieux saints et autres objets religieux, suggère la démolition des pièces qui entourent la tombe du Prophète et qui sont d'une haute importance pour les musulmans chiites.

Le document, de 61 pages, suggère que les restes du Prophète soient transférés au cimetière avoisinant d'Al-Baqi. Pour l'instant, souligne Andrew Johnson, rien n'indique que les autorités saoudiennes ont adopté cette proposition ou sont sur le point de la faire: le gouvernement saoudien a, par le passé, insisté qu'il traitera toujours la question des transformations des lieux saints de l'islam avec «le sérieux le plus extrême».

Cependant la mosquée est d'une telle importance pour les musulmans sunnites et chiites que, d'après le Dr Irfan Al-Alawi, la tentative d'entreprendre le moindre travail de transformation sur ce site causera de sérieux troubles. Et cela pourrait également embraser toute la région qui souffre, déjà, de très vives tensions sectaires en Syrie et en Irak.

Le ''BT'' rappelle aussi que les ulémas saoudiens n'ont jamais caché leur détermination wahhabite acharnée d'appliquer leur interprétation «pure et dure» d'interdire la vénération de toutes les reliques, tous les objets et tous saints qui seraient, selon eux, du «shirk», c'est-à-dire de l'idolâtrie.

Dr. Al-Alawi, directeur de la Fondation de la recherche sur l'héritage islamique, déclare: «Les gens visitent les pièces où la famille du Prophète a vécu et se tournent vers la chambre funéraire pour faire leurs prières. Et là, ils (les ulémas wahhabites saoudiens, NDLR) viennent interdire aux pèlerins de visiter ou de vénérer la tombe parce que, selon eux, pareille pratique serait du shirk, du polythéisme. Le seul moyen, pour eux, d'empêcher les musulmans de visiter ce lieu saint serait donc de transférer la tombe».

Irfan Al-Alawi avertit que les sunnites tout autant que les chiites seraient atterrés par la «profanation de ce haut lieu de la religion musulmane».

Les Saoudiens pourraient commettre cette irréparable erreur, semble suggérer Andrew Johnson. L'histoire récente a démontré qu'ils n'hésiteraient pas à la faire. Le reporter du ''BT'' cite une étude menée par le Gulf Institute, basé à Washington, sur l'extension de la Grande Mosquée (lire Multibillion-pound expansion of the Grand Mosque) qui a conduit à la destruction de 95% des bâtiments millénaires de la Mecque pour les remplacer par des hôtels grandioses, des appartements de luxe et de gigantesques centres commerciaux.

Le Roi Abdallah a nommé l'éminent imam wahhabite de la Grand Mosquée Abderrahmane Al-Soudias pour piloter ce projet d'extension qui, selon les responsables saoudiens, est devenu plus que nécessaire, étant donné le nombre sans cesse croissant des pèlerins.

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Tombeau du Prophète Mohamed à Médine.

Les bulldozers qui attendent l'ordre final

Dr. Al-Alawi déclare aussi que le rapport de cette consultation sur la Mosquée Al-Nabawi de Médine, rédigé par le Dr. Ali ibn Abdelaziz Al-Shabal de l'Université Islamique de l'Imam Mohamed ibn Saoud à Riyad, a été remis à la Commission de la Présidence des Deux Mosquées.

Plusieurs pages de ce rapport ont été récemment publiées dans le journal de cette présidence: ces larges extraits ainsi rendus publics traitent principalement de la démolition des pièces jouxtant la tombe du Prophète – ces espaces qui ont été occupés par les épouses du Prophète et ses filles, notamment Fatima.

Le document recommande également le déplacement du Dôme Vert et le transfert du tombeau du Prophète Mohamed.
Irfan Al-Alawi n'est nullement surpris par ce qui se trame dans les palais de la décision saoudienne. Il accuse que plusieurs profanations ont été commises par le passé. Il signale, par exemple, que le cimetière Al-Baqi abrite déjà les dépouilles de plusieurs membres de la famille du Prophète, y compris celle de son père qui a été déplacée pendant les années 1970.

Ainsi, conclut Dr. Alawi, «le Prophète sera anonyme. D'ailleurs, tout autour de la Mosquée du Prophète a déjà été détruit. Elle est à présent entourée par des bulldozers qui attendent l'ordre final. Une fois qu'ils ont tout déplacé, ils pourront investir la Mosquée elle-même. L'imam expliquera alors qu'il y a un besoin urgent d'opérer des extensions de la Mosquée, à un moment où toute l'attention du monde musulman est braquée sur les évènements en Syrie et en Irak...».

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