Arrivé aujourd’hui en début d’après-midi à Tunis, après 20 ans d’exil, le leader du mouvement islamiste Ennahdha, Rached Ghannouchi, a tenu un discours consensuel qui se veut rassurant.


A l’aéroport de Tunis, le cheikh a été accueilli par une foule compacte qui chantait l’hymne national et criait sa «fierté islamique» retrouvée. «Allah Akbar» (Dieu est le plus grand), a-t-il lancé à la foule, les bras tendus vers le ciel, avant d’être emporté par une vague de militants, tandis que des défenseurs de la laïcité, non loin de là, exprimaient leurs inquiétudes face à un retour de «l’obscurantisme».

La priorité est à la reconstruction
«Je ne vais pas me présenter à la présidentielle, et il n’y aura aucun (candidat) membre d’Ennahdha», a-t-il déclaré dans un entretien à l’agence Afp au domicile de son frère dans le nord de Tunis. Il n’a cependant pas écarté une participation d’Ennahdha à l’équipe de transition mise en place après la fuite de l’ex-président Zine El Abidine Ben Ali, le 14 janvier. «Si nous sentons que le gouvernement satisfait les attentes de ceux qui ont pris part à cette révolution, alors pourquoi pas?», a-t-il commenté.
Le cheikh Ghannouchi n’a pas exclu non plus une participation de son mouvement aux législatives, qui doivent être organisées, comme la présidentielle, dans un délai d’environ 6 mois à 8 mois, après la mise en place des meilleures conditions pour la tenue d’élections libres et transparentes.

ghannouchi rached

«Après 20 ans d’absence, mon parti n’est pas prêt à jouer un rôle sur la scène politique, la priorité est de reconstruire Ennahdha», a-t-il expliqué, comme pour rassurer les forces politiques, à l’intérieur et à l’extérieur qui redoutent la montée de l’islamisme en Tunisie et dans le reste des pays du Maghreb.

Un islam modéré proche de l’Akp turc?
Le mouvement Ennahdha, ex-Mouvement de tendance islamique (Mti) avait été interdit sous le règne le règne de Ben Ali, ses membres emprisonnées ou contraints à l’exil.
Son fondateur, intellectuel inspiré par les Frères musulmans égyptiens, qui dit aujourd’hui représenter un islam modéré proche de l’Akp turc, a tenu aujourd’hui à réaffirmer que «la charia (la loi islamique) n’a pas sa place en Tunisie» et que «la peur [à ce sujet] est uniquement basée sur l’ignorance», qu’il impute à la politique de diabolisation de son mouvement par Ben Ali.
En lançant, depuis le sol tunisien, ce message d’ouverture au gouvernement de transition, il espère voir son mouvement légalisé par les nouvelles autorités du pays, qui ont promis d’autoriser toutes les formations politiques sans exclusion. Il espère aussi rassurer les forces laïques, libérales et de gauche, mais aussi les mouvements féministes, assez puissants en Tunisie. Sera-t-il entendu de cet oreille?

Z. A. (avec les agences Tap et Afp)