L'agence de presse turque Anadolu affirme que les Juifs de Tunisie «pourraient voter pour des candidats islamistes, y compris ceux d'Ennahdha», aux législatives.

Par Marwan Chahla

René Trabelsi, dirigeant de la communauté juive de Djerba, n'aurait pas écarté la possibilité de voir certains citoyens tunisiens de confession juive soutenir le parti islamiste, indique ''World Bulletin'' (WB), le fil international d'Anadolu.

Et le ''WB'' d'enchaîner qu'un vote juif regroupé pour former un bloc électoral pourrait jouer un rôle déterminant.
''WB'' soutient son point de vue en s'appuyant sur les avis de «certains analystes» – dont il ne donne pas les noms. C'est à se demander si ces spécialistes existent véritablement ou s'ils ne sont pas tout simplement une pure invention turque. Peu importe, en tout cas...

Des plans sur la comète

''WB'' rappelle que, sur les 2.500 Juifs tunisiens, 1.500 sont basés sur l'île de Djerba et peuvent ainsi décider de l'issue du scrutin législatif du 26 octobre – à Médenine (sud-ouest du pays), par exemple.

Citant, encore une fois René Trabelsi, ''WB'' écrit que 80% des Juifs tunisiens se sont inscrits sur les listes électorales et qu'ils «font montre, à l'instar des autres Tunisiens, de leur enthousiasme à prendre part aux élections».

Bien plus que l'intérêt légitime que la communauté juive de Tunisie peut porter aux scrutins législatif, du 26 octobre 2014, et présidentiel, du 23 novembre 2014, ''WB'' semble accorder la très grande importance à ce que les Juifs tunisiens n'aient «aucune objection à soutenir des candidatures islamistes».

«Nous soutiendrons le parti politique qui présentera le programme économique dont le pays a réellement besoin, loin de toutes les considérations idéologiques ou religieuses», aurait confié René Trabelsi à l'agence de presse turque, dont on comprend la prudence et le souci de neutralité.

Anadolu fait dire à René Trabelsi ce que la Turquie d'Erdogan souhaite pour la Tunisie.

La Turquie vote Ennahdha

Afin que son message (de soutien aux Nahdhaouis) ne s'égare pas, ''WB'' rapporte également que, le 23 octobre 2011, lors de l'élection de l'Assemblée constituante, bon nombre de Tunisiens juifs auraient voté pour Ennahdha. Ce qui, bien entendu, aurait mérité d'être prouvé. Et d'insister que «beaucoup parmi eux n'hésiteraient pas à refaire confiance, cette fois-ci également, au parti islamiste». Cela s'appelle faire des plans sur la comète...

L'on a bien compris, donc, que ''WB'', Anadolu et – nous pouvons deviner assez facilement – d'autres parties turques soutiennent pour des raisons trop évidentes le parti de Rached Ghannouchi.

Tout ce «beau» monde turc omet de rappeler qu'Ennahdha a eu l'occasion de s'essayer au pouvoir en formant deux gouvernements, les Troïka 1 et 2 (décembre 2011-janvier 2014), qu'il a échoué sur tant et tant de plans, que les Tunisiens juifs, tout comme leurs compatriotes musulmans, en ont fait la douloureuse expérience, et qu'au moment d'aller aux urnes, il ne manqueront pas de s'en rappeler et de réfléchir par deux fois avant de mettre le bulletin dans l'urne.

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