Ahmed Néjib Chebbi et Mustapha Ben Jaâfar remonteront-ils la pente de sitôt ou sont-ils condamnés à disparaître bientôt de la scène politique?
Par Moncef Dhambri
Le cavalier seul de Chebbi
Ahmed Néjib Chebbi a trop souvent louvoyé, depuis le 14 janvier 2011. Il n'a jamais cessé de se positionner et se repositionner, il a été trop égocentrique et trop sûr de lui-même. Personne n'a osé contester, en l'espace de ces trois courtes années, sa dictature «éclairée» pour corriger la trajectoire que cet homme a dictée à sa formation politique... jusqu'au jour où «son» Al-Joumhouri soit devenu un navire fantôme et que l'équipage autour du capitaine Chebbi se soit limité à un groupe très restreint de fidèles trop suivistes.
Par manque de conviction sincère – en optant de camper dans l'opposition – et par ambition personnelle démesurée, M. Chebbi a tout sacrifié, y compris sa propre personne et la carrière de certains de ses brillants lieutenants qui auraient pu avoir droit à de plus grands honneurs et de plus hautes positions.
Le président d'Al-Joumhouri méritait, pourtant, un meilleur sort, eu égard à son parcours politique exceptionnel, vieux d'une quarantaine d'années, consacrées à défendre les libertés démocratiques et à combattre la dictature de Bourguiba, puis celle de Ben Ali.
La myopie politique de Ben Jaâfar
Mustapha Ben Jaâfar, pour sa part, a misé tout le poids électoral de «son» Ettakatol au scrutin de l'Assemblée nationale constituante (ANC) sur une aventure «troïkiste», pris le malsain plaisir de diriger les débats de la Constituante comme il l'a fait et très mal fait, il a été trop obsédé par sa «meilleure constitution au monde» et trop ménagé ses alliés islamistes, pour entendre les voix des autres dirigeants de son parti qui sentaient la catastrophe venir. Beaucoup ont d'ailleurs démissionné et rejoint d'autres partis démocratiques et progressistes.
Les myopie et naïveté politiques, le manque d'expérience tactique, l'égocentrisme et la suffisance de cet homme ont usé jusqu'à la corde les ressources «ettakatolistes» pour ne laisser à M. Ben Jaâfar que de très petits moyens pour se lancer dans la bataille présidentielle.
Dans cette course, avec un traumatisant «zéro siège» au prochain parlement, M. Ben Jaâfar ne pouvait être que l'égal de son parti. Il ne pouvait que constater que l'on ne «flirte» pas, comme il l'a fait, avec les islamistes sans y laisser des plumes... toutes ses plumes.
De quoi son avenir et celui de son parti sera-t-il fait? Sans doute pas de triomphes électoraux, la traversée du désert risquant de durer longtemps, très longtemps...
Reste une question, qui brûle les lèvres des observateurs et des analystes politiques, sans qu'ils osent encore la poser, par égard pour le passé des deux hommes : auront-ils le courage et la responsabilité de démissionner et de laisser leurs partis respectifs se réformer et faire émerger de nouveaux leaderships, plus jeunes et plus en phase avec la nouvelle situation en Tunisie.
Note:
(1) Selon l'institut de sondages Emrohd Consulting (EC), Ahmed Néjib Chebbi a obtenu 0,62% des voix exprimées et Mustapha Ben Jaâfar 0,5%. L'on est loin, très loin, des 44 et 31% obtenus par MM. Caïd Essebsi et Marzouki, respectivement, selon EC.
{flike}