greve tunisie
Un sit-in par-ci, une grève par-là, des administrations fermées, des bureaux évacués de leur personnel, des agents de police côte-à-côte avec les soldats essayant de contrôler une situation très tendue.


On se le demande jusqu’à quand? Jusqu’à quand la Tunisie pourrait tenir… Les pertes économiques s’accumulent au fil des jours passés à ne rien faire. Et les grèves qui se succèdent vont envenimer encore la situation voire paralyser le pays qui n’est pas encore sorti de l’auberge révolutionnaire.
Tout le monde appelle tout le monde à la grève. Et tout le monde fonctionne aujourd’hui au ralenti. La grève est un droit. Hier encore inaccessible. Le Tunisien peut enfin s’exprimer et exiger son droit de travailler et de vivre dignement.
Aujourd’hui tout le monde scande des slogans et réclame la régularisation de sa situation. Tout de suite! Tout de suite sinon pas de travail. Entre les employés et leur employeur, dorénavant, c’est le bras de fer. «Ce n’est pas du chantage, c’est notre droit. Nous ne croyons plus ces responsables qui, comme d’habitude, ne font que nous balancer des mesures pour bientôt. Ce sont des faits annonces… Aujourd’hui, nous voulons du concret», dit Faouzi qui travaille depuis des années à la mairie de Tunis.

Où est passé monsieur le maire?
Mercredi, du côté de la Kasbah. A la mairie de Tunis, il y a comme un air de fronde. Comme Faouzi, Adel, Mounira, des centaines de protestataires ne font plus confiance à leurs employeurs. Ils ont investi très tôt la mairie. Ça fait déjà leur troisième jour. Ils attendent le maire se prononcer en faveur de leur demande. Mais monsieur le maire ne vient pas. Dans les rangs, certains lui reprochent bien des choses sur la gestion de la mairie. D’autres, moins nombreux, lui cherchent des circonstances atténuantes. «Il est malade». Qui le seconde? C’est Moncef Sâïed, son secrétaire général.



Alors que la foule crie sa colère dehors, M. Saâyëd tient une réunion avec six de ses collaborateurs dont trois syndicalistes. Impossible d’entrer à l’intérieur de la bâtisse. Les portes sont cadenassées. Soldats et policiers font la garde. Ça crie de plus en plus… Pour rencontrer le secrétaire général au deuxième étage, c’est presque la mer à boire. Il a fallu faire des mains et des pieds… et utiliser parfois la ruse pour y arriver. Et ça a marché. Mieux encore! Kapitalis a pu même assister à la réunion.
«Nous venons de nous prononcer sur la titularisation de plusieurs employés. Nous leur avons passé un agenda et au fur et à mesure, leur situation sera régularisée. Mais ça demande un peu de temps, c’est cas par cas. Tous seront régularisés entre février et juillet. Ils demandent aussi le statut communal, ceci ne dépend pas de nous», précise M. Sâïed.

La roue grince sans tourner
Autour de la table, on discute calmement afin de trouver une issue pour que ces manifestants remettent leur blouse de travail. Dehors, la colère monte d’un cran. Des allées et des venues dans tous les sens. Mais pas de débordement… Tout comme dans le ministère de la Culture. Là aussi, il y a foule. Des discours qui tournent encore dans le vide. Pas facile de déraciner le mal d’un héritage de 23 ans de dictature. Les subventions, le Quatrième Art, le dossier du cinéma, celui de la musique, celui du patrimoine… Ça fait comme boule de neige. Un peu plus bas, en face du ministère de l’Education, la même rengaine, on tourne en rond du matin au soir. Plus bas, des «cas sociaux» au pied des ministères de La Kasbah… ont des choses à dire. Trop de choses. De l’autre côté, le même scénario se répète… Pratiquement dans toutes les rues. Des rues qui puent les ordures ménagères… Les poubelles n’ont pas été ramassées depuis des jours. La roue de la démocratie grince et a du mal à tourner… la page de Ben Ali.

Zohra Abid