Ghannouchi-et-Larayedh-au-Conseil-de-la-ChouraLe Conseil de la Choura d’Ennahdha a donné son accord, samedi 10 janvier 2015, pour la participation du mouvement islamiste au prochain gouvernement. Un coup de bluff...

Fathi Ayadi, le président du Conseil, a justifié cette décision par «le principe de consensus au service de l'intérêt national», ajoutant que les dirigeants d’Ennahdha tiennent à la neutralité et à l’indépendance politique des titulaires des portefeuilles ministériels régaliens dans le prochain gouvernement.

Le Conseil de la Choura s’est réuni, samedi et dimanche, à Hammamet pour «décider si le mouvement va faire partie du gouvernement Habib Essid ou camper dans l'opposition», a encore indiqué M. Ayadi.

Au-delà des mots et des postures, Ennahdha cherche à montrer qu’il n’a pas encore été totalement exclu du pouvoir et que, malgré sa défaite aux dernières élections législatives et présidentielles, il a encore voix au chapitre, au point de décider, ainsi comme un grand, de «participer au prochain gouvernement» (sic !)... qui sera constitué par son adversaire Nidaa Tounes.

Il s’agit là, on l’a compris, d’un de ces coups de bluff auxquels Ennahdha est habitué. Le parti islamiste cherche à faire accréditer l’hypothèse de sa participation au prochain gouvernement, qui est loin d’être acquise. Au contraire : ceux qui la défendent sont très minoritaires au sein de Nidaa Tounes et de ses alliés dans la constitution du prochain gouvernement.

Ennahdha cherche aussi à montrer qu’il a encore les moyens de faire pression sur la nouvelle majorité et de négocier, outre quelques portefeuilles ministériels au prochain gouvernement, la «neutralisation» des ministères de souveraineté, notamment l’Intérieur et la Justice, pour éviter d’avoir à rendre compte des abus des anciens titulaires de ces postes sous les gouvernements de la Troïka 1 et 2, conduits par les islamistes Hamadi Jebali et Ali Larayedh.

Le président de la république Béji Caïd Essebsi et le parti Nidaa Tounes, qui ont axé leurs campagnes électorales sur la promesse de faire la vérité, toute la vérité, sur les assassinats politiques, ne sauraient, aujourd’hui, tourner le dos à leurs électeurs en s’acoquinant avec ceux qui, deux années durant, ont couvert les complicités au sein de l’institution sécuritaire et empêché la justice de faire son travail.

M. Caïd Essebsi et Nidaa Tounes savent très bien que pour l’écrasante majorité de leurs électeurs, l’appui d’Ennahdha au prochain gouvernement (ou son passage dans l’opposition) ne saurait être monnayé aux dépens de la vérité et de la justice. Ce serait la ligne rouge à ne pas franchir, si Nidaa Tounes veut éviter le sort réservé par les électeurs à Ettakatol et au Congrès pour la République (CpR), sanctionns pour s'être trop liés à Ennahdha. 

Imed Bahri

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