Les actions de solidarité des Tunisiens du monde sont nombreuses, mais cette mobilisation aussi importante soit-elle ne suffit pas à calmer le sentiment d’insuffisance qui nous anime? Par Samir Bouzidi


A l’heure où la Tunisie a un besoin impérieux de ses 1,4 million d’enfants à l’étranger (et au moins autant d’amis),  nous regrettons que dans le gouvernement de transition, aucun ministre ou secrétaire d’Etat ne soit en charge du portefeuille des Tunisiens de l’étranger.
Cette absence d’interlocuteur dédié a un impact certain sur la fluidité de nos actions. Soucieux de soulager l’agenda déjà très chargé de nos ministres, nous réfléchissions à la mise en œuvre rapide d’une marketplace sur Internet visant à mutualiser nos ressources et partager nos expériences et contacts.
Concernant la solidarité internationale, nous craignions que dans l’attente d’un retour à la stabilité politique et la consolidation du processus démocratique, les aides institutionnelles (d’Etat à Etat) soient réduites à une peau de chagrin. La réussite d’élections démocratiques et la «couleur» politique du futur président et gouvernement devraient conditionner la réouverture plus ou moins rapide des vannes.
Ce qui est d’ores et déjà acquis pour les prochains mois: l’Union européenne vient de déclarer qu’elle apportait une aide financière à l’organisation des élections. Luttes d’influences obligent, les Etats-Unis et d’autres pays (la Chine…) devraient surenchérir.
Première conséquence: pour boucler le financement des dépenses sociales qui vont exploser dans les prochains mois, le pays ne doit compter que sur lui-même et la solidarité de la diaspora semble incontournable. En clair, nous les Tunisiens de l’étranger, nous devons mettre la main à la poche.
Nous avons réfléchi à quelques sources de financement structurel rapidement exploitables :
1. Une taxe solidarité Tunisiens de l’étranger:
* d’un montant de 7 à 10 euros sur tous les billets de compagnies aériennes et maritimes tunisiennes (Tunisair, Nouvelair, Karthago, Ctn…) ou étrangères ;
* d’un montant de 0,1 euro/mn sur les tarifs télécoms entrants prélevés par les opérateurs télécoms tunisiens ;
* d’un montant de 5 euros sur les tarifs prestations consulaires ;
2. Un compte solidarité*:
Ouvert au nom de la Banque centrale de Tunisie (Bct), pour éviter le syndrome du ‘‘26-26’’, ce compte serait encadré par un commissaire aux comptes et un magistrat. Pour économiser sur les 20 euros en moyenne de frais de virement bancaire vers la Tunisie, ce compte doit être ouvert dans une succursale locale d’une banque résidente dans les principaux pays d’accueil de notre communauté. Pour info, cette proposition a déjà rassemblé 12.000 membres sur le groupe Facebook  «Initiative des Tunisiens à l’étranger pour la reconstruction de la Tunisie».
Ces mesures prioritaires viendraient s’ajouter aux nombreuses actions de soutien social initiées par les Ong ou autres particuliers tunisiens à l’étranger (tourisme et commerce solidaires, événements humanitaires…)
Par ailleurs, à la faveur d’un lobbying bien exercé de notre communauté sur les gouvernements de nos pays de résidence, à l’image de qui se fait en France, en Suisse et au Canada, on peut espérer, sous un délai maxi de 24 mois, le rapatriement en Tunisie des fonds dérobés par le clan Ben Ali.
Selon nos contacts auprès de  l’Ong Transparency International, concernant les biens immobiliers en Europe et les liquidités placées au Moyen-Orient et dans les paradis fiscaux, ces délais seront beaucoup plus longs du fait d’une procédure plus complexe et de forces politiques contraires dans certains pays.

* Cette proposition a déjà reçu l’aval d’Elyes Jouini, ministre des Réformes économiques et sociales.

Source : ‘‘Tunisiens du Monde’’.