En présentant sa démission, cet après-midi, le Premier ministre Mohamed Ghannouchi a apporté des éclairages sur les conditions dans lesquelles il a accepté de rester en poste après la fuite de l’ex-président. Extraits…


«Le 14 janvier, alors que les manifestations massives se déroulaient sur l’avenue Habib Bourguiba, j’étais dans mon bureau. Quand le gouvernement a été dissout et que j’ai été nommé par l’ex-président de constituer un nouveau gouvernement, j’ai décidé de quitter mes fonctions. Aussi, le vendredi 14 janvier, je suis resté jusqu’à 18h pour réunir mes papiers personnels et partir pour ne plus revenir. J’étais très affecté, ainsi que ma famille, par les dépassements que le pays a vécus. Alors que je m’apprêtais à sortir, j’ai reçu un appel téléphonique du responsable de la garde présidentielle qui m’informe que le président a quitté le pays et me demande d’assurer l’intérim. Je lui dis ma décision de quitter mes fonctions. Il raccroche, puis rappelle et me dit qu’il se passerait des choses graves et qu’il y aurait une mer de sang si je n’assumais pas mes responsabilités. Il a ajouté que si je ne rejoignais pas d’urgence le Palais de Carthage, il me ferait assumer la responsabilité de tous les morts qui tomberaient.
Je me suis d’abord assuré que l’ex-président a quitté le pays. J’ai téléphoné au ministre de la Défense et cet appel a sauvé le pays d’un bain de sang. Sans informer ma famille, j’ai rejoint le Palais de Carthage. Je suis entré au Palais. J’ai trouvé MM. Mebazza et Kallel. Et on m’a demandé de prendre la responsabilité pour combler le vide constitutionnel. La suite vous la connaissez.»
Ce témoignage présente une version nouvelle et, à ce titre, intéressante des événements, qui montre que l'un -chef de la garde présidentielle, Ali Sériati, aujourd'hui en détention, a joué le rôle principal dans l'opération de passation du pouvoir présidentiel à Ghannouchi, puis à Mebazaa. Ce qui veut dire aussi que l'armée n'était pas, à ce moment précis, au premier plan, et qu'elle a laissé la question se régler entre politiques.