Le ministère de l’Intérieur annonce la «suppression de la police politique». Cette annonce laisse perplexe, car jamais ledit ministère n’a communiqué jusque là sur l’existence d’un service distinct ainsi appelé. De quoi s’agit-il?
Dans un communiqué diffusé aujourd’hui, le ministère affirme avoir déjà entamé les mesures suivantes:
«- la rupture définitive avec toute forme d’organisation s’apparentant à la ‘‘police politique’’ aussi bien au niveau de la structure, des missions ou des pratiques ;
«- la suppression de la direction de la sûreté de l’Etat ;
«- la réaffirmation de l’engagement du ministère de l’Intérieur à appliquer la loi et à respecter les libertés et des droits civiques.»
Climat de confiance et de transparence?
Dans son communiqué, le ministère de l’Intérieur précise que ces mesures pratiques «interviennent en symbiose avec les valeurs de la révolution, dans le souci de respecter la loi, dans le texte et dans la pratique, et en consécration du climat de confiance et de transparence dans la relation entre les services de sécurité et le citoyen».
Ces mesures, ajoute le communiqué, «sont également prises dans le souci de pallier aux déficiences enregistrées sous l’ancien régime, au niveau de cette relation, et dans le cadre de la réorganisation des structures de la sécurité intérieure, en s’inspirant des réglementations en vigueur dans les Etats démocratiques ainsi que des expertises et expériences de ces pays.»
Ces mesures, relève encore le communiqué, «s’inscrivent dans le droit fil de la nouvelle approche des attributions du ministère de l’Intérieur et de la volonté de poursuivre l’action déjà entamée en vue de contribuer à la réalisation des attributs de la démocratie, de la dignité et de la liberté.»
Ces longues phrases empesées sont aussi vagues qu’alambiquées. C’est beaucoup plus une déclaration d’intention qu’une décision pratique suivie d’exécution immédiate. Auquel cas, on pourrait se demander, si la dissolution de ladite «police politique» va être suivie d’une enquête sur ses pratiques ou ses abus. Les archives de cette police sont-elles conservées afin que les Tunisiens et les Tunisiennes qui en ont été victimes puissent jeter un coup d’œil sur leurs dossiers? Que doit-on comprendre exactement? Que les abus anciens doivent passer par perte et profit?
Quid des archives ?
En réponse à une question relative à ce sujet, le Premier ministre Béji Caïd Essebsi est resté, lui aussi, très évasif, lors de la conférence de presse de ce soir au Palais de Carthage, se contentant de répondre que les personnes ayant commis des délits seront jugées, sans préciser de quelles personnes et de quel genre de délit il s’agirait.
Selon Nabil Abid, directeur de Sûreté nationale par intérim, qui répondait à la Chaîne nationale, «la police politique» est un épouvantail que l’ancien régime agitait, dans sa guerre psychologique, pour faire peur aux citoyens. Il s’agirait de quelques milliers d’agents, de 4.000 à 9.000 (on appréciera l’exactitude) sur un effectif total de 50.000 agents, tous corps confondus.
R. K.